Accepter l’incertitude, s’appuyer sur quelques tendances clefs… et s’adapter !

Marianne Riou

2020 a été une année de bouleversements. Une année où toutes nos certitudes ont été bousculées. Or nous faisons tout pour appuyer nos décisions professionnelles (mais souvent personnelles également) sur des certitudes, toujours dans notre quête de prendre les « meilleures » décisions.

C’est ce que cette année 2020 nous a rappelé. Nous vivons bel et bien dans un monde d’incertitude. Et si nos entreprises, à tous autant que nous sommes, sont toujours là en ce début 2021, c’est que nous avons su accepter cette incertitude et nous y adapter. Nous avons su prendre les évènements comme ils venaient et faire front. L’agilité s’est révélée être une compétence clef. Pour continuer à avancer, hier, comme demain.

Cette année 2020 a cependant clarifié des tendances que l’on voyait se dessiner. Alors, bien malin qui pourra dire de quoi 2021 sera faite, je ne m’y risquerai pas ! Mais s’arrêter quelques instants et faire le point sur les tendances les moins incertaines pourrait bien s’avérer utile. Histoire de parer à quelques éventualités ou d’avoir quelques ressources sous le coude pour faire preuve… d’agilité !

Le monde des bijoux en diamant a encore de beaux jours devant lui

Et peut-être plus que nous ne l’imaginions ! Si de mars à mai, 2020 nous a tous mis à mal, les achats de bijoux sont ensuite revenus à la hausse et ce pour notre plus grande surprise. Les bijoux en diamant ont même été performants voire très performants pendant la période des fêtes.

La bonne nouvelle c’est que le revenu discrétionnaire investit en 2020 dans les bijoux en diamants, pour des raisons émotionnelles tant que conjoncturelles, sera toujours disponible en 2021. Nous le voyons bien, notre chemin de croix avec la crise du coronavirus est loin d’être achevé. Entre couvre-feux et re-confinements, l’investissement ne peut toujours pas se faire dans le partage d’expériences, les sorties au théâtre, les restaurants et les voyages… ou du moins pas avant des mois. Cette année nous l’a confirmé : les bijoux en diamant portent toujours une charge émotive forte. Ils sont aussi porteurs de sens, sont un cadeau durable, permettent de célébrer les moments forts ou les relations, « font du bien » et nous apportent une forme de soulagement en ces moments difficiles.

Une idée que j’ai lue à droite à gauche ou entendue entre séminaires et podcasts et qui m’a beaucoup amusée est que, en réunion Zoom, dans un souci de représentation, afficher de beaux bijoux, volumineux, en diamants et de valeur, au cou ou aux oreilles, faisait sens. Voilà que nous allons souhaiter encore de nombreuses visioconférences !

L’industrie des diamants a tenu le coup

Les baisses et pénuries de stocks, les besoins des retailers à combler et la force de la demande… Tout ceci a profité à l’ensemble de la chaîne de valeur de l’industrie des diamants, qui a connu une année 2020 « pas si catastrophique », même si l’impact économique a été important et que des changements profonds, structurels ont vu le jour. Les prix de certains diamants ont même augmenté dans le midstream et nous allons continuer à surfer sur cette vague au moins au premier trimestre 2021. Les miniers ont, dans l’ensemble, préféré une stratégie de maintien des prix de vente au volume et libéré leurs clients privilégiés d’une partie de leurs obligations, ce qui aura permis à de nombreux acteurs de l’industrie (aux bases solides) de tenir le coup. Cependant, même si certaines mines sont toujours fermées et les échanges prudents, les stocks des miniers ont bien évidemment augmenté et nous verrons comment ils entendent les écouler. Ils viennent de remonter les prix des diamants bruts (entre 4 et 7%) suite à une bonne demande lors de la période des fêtes et De Beers vient également d’officialiser la réorganisation de ses contrats.

Le marché des bagues de fiançailles en diamant se distingue 

Comme l’a souligné De Beers dans son dernier rapport Flash Diamond Insight (Les fiançailles, moteur de la demande de bijoux en diamants pour les fêtes) : « Les bijoutiers américains ont noté qu’un nombre de couples plus important que jamais achète des bagues de fiançailles en diamants. » Les ventes de bridal ont ainsi porté la demande des ventes de bijoux en diamant (à une période où de nombreux mariages ont été reportés.) Et ce qui est particulièrement intéressant, c’est que les consommateurs ont souvent préféré « passer au niveau supérieur en termes de couleur, de taille et de pureté, plutôt que de grosseur» Pour le coup, cette tendance-là est liée à la crise et il est trop tôt pour affirmer qu’elle se maintiendra quand nous en sortirons. Mais nous pouvons nous attendre à ce qu’elle perdure en 2021 et c’est pourquoi il est important de la signaler. 

Ne pas bouder sa stratégie digitale et l’omnicanal 

C’est une tendance dont nous observons la montée en puissance depuis quelques années, mais elle est devenue évidente pour le marché des bijoux et a fortiori ceux en diamant : les achats en ligne ont beaucoup augmenté. Pendant les fêtes, les ventes de bijoux en ligne aux États-Unis ont ainsi progressé de 44,6 % (chiffres NRF). Dans l’idée de faire le bon achat, celui qui leur correspond vraiment, les consommateurs étudient les produits en ligne, se renseignent, font le tour des réseaux, « testent » les produits en ligne et préparent leurs achats sur le net. Certains concrétiseront leurs achats sur internet, d’autres en magasin, même si « voir » un bijou en vrai reste important et l’échange physique (qui nous manque tant !) également. Dans tous les cas, la qualité de l’expérience d’achat, les informations, l’interaction avec le vendeur ou la Maison, les propositions ou l’envie d’appartenir à une communauté de marque sont décisifs. Donner du sens à sa relation client et à l’achat qui en découlera importe beaucoup. D’un point de vue pratique, le b.a.-ba est de montrer et proposer de belles photos, avoir suffisamment de stock et d’offre, bien décrire le produit, comprendre la demande, donner des informations sur sa provenance, engager un vrai dialogue, tenir le client par la main, garder le lien après-vente, etc. Les expériences d’achat en ligne et en boutique forment un tout indissociable. 

Regarder vers l’avenir, c’est regarder vers l’Asie, Chine en tête

Le marché des biens de luxe personnel a été mis à mal en 2020 et pour la première fois depuis une décennie (baisse de 23 % environ). Mais la Chine se dirige cependant tranquillement et plus vite que prévu vers la place de marché principal pour le monde du luxe. Le marché asiatique, Chine en tête, EST fondamental quoi qu’il advienne et plus que jamais pour le luxe et donc pour les diamants. Les achats en Chine se sont repris très vite alors que le reste du monde subissait la crise sanitaire de plein fouet. Selon Bain & Company, « le marché des biens de luxe de Chine continentale devrait atteindre un taux de croissance de 48 % en 2020 », ce qui a contribué à « doubler la part globale de la Chine dans le luxe international, jusqu’à atteindre 20 % » (Croissance inarrêtable pour le marché du luxe chinois en 2020). Toujours selon Bain & Company : « D’ici 2025, les consommateurs chinois représenteront près de 50 % des acheteurs de luxe dans le monde » (Pas de relance des ventes de luxe avant deux ans). CQFD.

Les diamants naturels ne faiblissent pas face aux diamants synthétiques

Les diamants synthétiques auraient aussi connu une bonne année compte tenu du contexte. Mais les deux marchés, bijoux en diamants naturels et bijoux en diamants de laboratoire, restent distincts. Certaines catégories, plus proches des bijoux de mode, ont eu un grand succès dans le secteur des diamants synthétiques, comme les clous d’oreille (surfez régulièrement sur le site de Lightbox pour vous en convaincre.) Le nombre de consommateurs connaissant et possédant des diamants synthétiques a par ailleurs, et assez logiquement, augmenté. Enfin, et c’est important, aux États-Unis, Blue Nile, principal vendeur de diamants en ligne, a conclu un accord avec Lightbox pour vendre ses bijoux… « de mode ».

La RSE, la traçabilité et l’engagement sont une nécessité pour demain

S’impliquer en matière de RSE – ce qui va de prendre soin de ses équipes à prendre en compte l’impact économique et environnemental de son produit – est devenu une lapalissade ! Quel que soit le niveau de connaissance de vos clients et de compréhension des enjeux du secteur, soyez en avance dans ce domaine ou dépêchez-vous de rattraper votre retard. Entre deux produits équivalents l’engagement en matière de RSE est un facteur de décision. Et pour les diamants, cela se traduit en termes de traçabilité. D’où vient ce diamant ? Si je l’achète à quel point est-ce que mon acte d’achat pèse sur l’environnement du pays d’extraction, est-ce que je contribue – ou pas – au bien être des populations locales ? La bonne nouvelle étant que dans l’industrie du diamant nous avons encore toutes les cartes en main pour expliquer, raconter, informer, augmenter le niveau de connaissance sur les diamants. Et vous noterez que De Beers, souvent précurseur et prescripteur dans notre industrie, s’est engagée à indiquer l’origine et l’impact de tous ses diamants d’ici 2030. 

Raconter la bonne histoire…

…créer une connexion émotionnelle, un lien. Les clients ont un besoin d’identification fort, notamment les générations les plus jeunes, ce qui constitue d’ailleurs une des forces des grandes marques plébiscitées. Elles ont un passé, une histoire sur laquelle s’appuyer. Quand les gens achètent une marque, désormais ils portent, tant au propre qu’au figuré, les valeurs de cette marque. Chaque marque doit donc « bien » se raconter, aller chercher dans son passé ce qui fera mouche et est en phase avec notre époque, raconter une histoire qui fasse sens, dont on puisse se rappeler et y intégrer le bon message en matière de transparence et RSE. Il faudrait que le consommateur arrive à se dire : « Ce bijou en diamant est bien plus qu’un bijou en diamant, il va apporter quelque chose à ma vie, c’est un cadeau qui me touche d’autant plus qu’il porte en son sein une histoire et des valeurs fortes… »

L’incertitude n’est pas une fatalité. Nous avons des tendances sur lesquelles nous appuyer et qui nous aident à nous réinventer.

Pour conclure, j’aurais juste envie de vous dire : soyez flexibles, créatifs et gardez la foi. Informez-vous pour comprendre voire anticiper les tendances, enfin travaillez votre savoir-faire comme vos compétences, développez votre « niche » et créez vos propres opportunités !

 
 À lire ou écouter pour mieux comprendre les évolutions de notre secteur 

 La pandémie, catharsis de l’industrie diamantaire ?
De Beers limite ses sightholders et crée des catégories de clients
 Croissance inarrêtable pour le marché du luxe chinois en 2020
Hausse de 44,6 % des ventes de bijoux en ligne pendant les fêtes
Podcast : L’année qui a transformé le marché diamantaire
Ni un résumé de 2020, ni une prédiction pour 2021
Guide des outils ayant permis de survivre à 2020
Paul Zimnisky attribue la reprise du marché diamantaire à la demande pour les fêtes
 La demande pour les fêtes relève le marché des diamants
 De Beers vise la pleine traçabilité d’ici 2030
 Les fiançailles, moteur de la demande de bijoux en diamants pour les fêtes
Pas de relance des ventes de luxe avant deux ans
 De plus en plus de détaillants vendent des diamants synthétiques

Source Rubel & Ménasché