Rapport sur le marché du brut pour le mois d’août : baisse de la demande, érosion des premiums

Edahn Golan

Ces deux derniers mois, les prix sur le secteur du brut ont été influencés par deux facteurs : une bonne demande de taillé, associée à des prix en hausse, et l’annonce par ALROSA qu’elle réduirait son offre de brut entre juillet et septembre. [:]Avec ces deux facteurs qui vacillent, la demande, les prix et l’humeur de l’industrie piquent du nez ces dernières semaines.

La demande de taillé a reculé en août, suivant une tendance saisonnière, typique des vacances d’été. Les prix ont également reculé, de concert avec la demande, incitant les fabricants à se montrer prudents pour éviter une accumulation de leur stock.

Le ralentissement de l’approvisionnement, annoncé par ALROSA en juin, a quasiment pris fin, du moins dans l’esprit des acheteurs. Ils s’attendent à ce que le géant russe du diamant augmente son offre. Ce ne sera toutefois pas le cas dans l’immédiat.

Un sight estimé à 700 millions de dollars

Le ralentissement intervient après plusieurs gros approvisionnements de la De Beers au cours des derniers sights, laquelle a profité du marché bien disposé. De son point de vue, la De Beers s’est ruée sur le marché de façon intelligente : en proposant une offre volumineuse, sans hausse de prix.

Le sight du mois d’août est estimé à quelques 700 millions de dollars, bien inférieur à celui du mois de juillet (de 800 millions à 850 millions de dollars), mais il reste pourtant important. Les prix n’ont généralement pas changé, même si quelques négociants ont remarqué une baisse de qualité sur les assortiments de certaines boîtes.

Le retour des refus

L’offre importante de la De Beers a peut-être participé à l’idée que le marché se faisait du sight, à savoir qu’il dépasserait largement les 700 millions de dollars. Toutefois, des refus ont fait reculer le montant total. Selon les estimations basses, de 4 % à 5 % des marchandises en valeur n’ont pas trouvé preneur. Les estimations hautes poussent ce chiffre à près de 10 %. La réalité se situe probablement au milieu, aux environs de 6 % à 7 %.

Les refus sont dus à une absence de rentabilité. Par exemple, un sightholder a indiqué que les plus grosses marchandises, de plus de 10,8 carats, de même que le brut de 5 à 14,8 carats étaient trop chers.

Que fera désormais la De Beers de ces marchandises ? En théorie du moins, elles ont été mises de côté pour les acheteurs accrédités, qui doivent encore être sélectionnés. Vous vous en souvenez peut-être, les acheteurs accrédités sont les clients de la De Beers qui répondent aux exigences élevées en matière de rapports financiers et de normes éthiques auxquelles sont soumis les sightholders, mais pas aux exigences élevées de volume d’achat. Ils se verront proposer les marchandises qui ne sont pas dans l’ITO – la production supplémentaire (hors programme) et les refus des sights.

Ceci a, bien entendu, un effet sur les refus. Un sightholder qui se rétracte plusieurs fois face aux mêmes marchandises risque de perdre son approvisionnement – ou du moins une partie. Pas étonnant que certains d’entre eux considèrent qu’une fois de plus, ils achètent « avec un pistolet sur la tempe », comme l’a affirmé un initié – ils sont obligés d’acheter, faute de quoi  ils risquent d’y perdre à long terme. Par conséquent, dans certains cas (ou bien souvent, diront certains), les marchandises ont été achetées à perte, dans le seul but d’assurer l’approvisionnement à long terme.

Une note à propos des acheteurs accrédités : actuellement, le marché estime que très peu de sociétés peuvent se qualifier comme acheteurs accrédités, en raison des normes comptables exigées. Je ne suis pas certain que le groupe de sociétés candidates soit très limité. Après tout, s’il y a 20 sociétés admissibles, cela laisse un bon nombre d’entreprises qui sont de possibles futurs sightholders.

L’offre d’ALROSA pour 270 millions de dollars

Après l’annonce faite en juin d’une diminution de l’approvisionnement, ALROSA a en effet réduit son offre. Celle du mois d’août est estimée à 270 millions de dollars. La société ne devrait proposer que 300 millions de dollars de brut en septembre.

Selon un sightholder anversois, la baisse de l’offre en septembre soulagera le marché : l’approvisionnement important de la De Beers lors de ses derniers sights a en effet laissé beaucoup de marchandises à digérer. En fait, l’offre volumineuse proposée pendant la période estivale a provoqué une indigestion sur le marché, contribuant au ralentissement actuel.

En l’absence de sight en septembre (le prochain aura lieu en octobre) et avec une offre assez réduite d’ALROSA, les fabricants vont pouvoir reprendre leur souffle ce mois-ci.

Cette pause sera bénéfique, étant donné la situation des liquidités, principalement en Inde. Le problème des liquidités refait surface et les sociétés dotées de contrats d’approvisionnement avec les deux grands miniers ont besoin d’une excuse pour ne pas acheter pour l’instant.

Le 30 août, ALROSA a annoncé de bons résultats pour le deuxième trimestre, dont une hausse du prix moyen et du volume des ventes de brut – juste avant le ralentissement actuel. En volume, les ventes de brut étaient en hausse de 10 %, à 21,1 millions de carats au premier semestre 2014, malgré un recul de 7 % de la production, à 15,9 millions de carats. Pourtant, les chiffres montrent qu’ALROSA a vendu plusieurs millions de carats de brut de son stock.

La hausse du prix moyen était attribuable à une amélioration des assortiments, en hausse de 8 % pour les marchandises de qualité, mais ne concernait pas tous les prix, ce qui est surprenant. La société a déclaré que le prix moyen avait baissé de moins de 1 %, en raison des « conditions de marché ». Cela contraste avec la hausse des prix d’autres producteurs et d’autres déclarations relatives aux prix d’ALROSA.

L’érosion des premiums

Du fait de la grande quantité de marchandises présentes sur le marché, la demande a considérablement ralenti (voir le tableau ci-dessous), d’où un recul des premiums dans de nombreuses catégories. Le ralentissement est tel que les usines chinoises, qui tournaient auparavant à plein régime, recherchent soudain du travail de façon active. Un fabricant a affirmé avoir été approché, ces dernières semaines, par plusieurs structures de taille chinoises qui cherchaient du travail et étaient prêtes à baisser leurs prix.

Il se peut que d’autres motifs justifient cette disponibilité mais il est tout au moins important de savoir qu’il existe une capacité supplémentaire, utilisable par l’industrie.

Les craintes persistent

Les fabricants qui se tournent vers l’avenir sont préoccupés par plusieurs questions. L’état du financement à Anvers – la vente d’ADB à un groupe chinois doit encore être approuvée – est quelque peu confus. Que fera KBC, le propriétaire actuel de la banque, si la vente n’est pas finalisée ? Certains craignent que KBC ferme tout simplement ADB. L’incertitude ne contribue pas à insuffler de la confiance sur le marché.

Un autre problème est la menace constante d’une interdiction des importations de diamants de Russie, dans le cadre des sanctions de l’UE à l’égard de la Russie, pour son implication en Ukraine. La décision nuirait à l’industrie diamantaire à Anvers. Les sociétés indiennes et israéliennes sont moins inquiètes car elles ne s’attendent pas à ce que leurs gouvernements sanctionnent la Russie.

Perspectives
Le mois de septembre devrait être calme pour les échanges de brut, les fabricants étant principalement concentrés sur la création de chiffre d’affaires. Le salon de Hong Kong apportera bientôt certaines réponses quant à la demande en Asie, mais sans indication claire sur la Chine, beaucoup de Chinois étant en vacances à cette époque.

Tout juste de retour de leurs vacances d’été, les négociants d’Anvers et de Tel Aviv commencent à reprendre leurs marques. Les échanges de taillé devraient commencer à se ressaisir, entraînant peut-être une hausse modérée des prix.

Le mois d’octobre est généralement le théâtre d’une hausse de la demande de taillé, dans le cadre d’une montée en puissance avant la saison des fêtes. Cette hausse de la demande aura lieu car l’offre de brut devrait augmenter, redonnant, espérons-le, de la dynamique à tout le marché.

Demande pour les principales boîtes de la De Beers après le sight du mois d’août

Article Demande* Remarques sur la demande
Fine 2,5 à 4 ct & Fine 5 à 14,8 ct Demande moyenne Demande inférieure à celle du sight précédent.
Crystals 2,5 à 4 ct & Crystals 5 à 14,8 ct Demande moyenne Demande identique à celle du sight précédent.
Commercial 2,5 à 4 ct et 5 à 14,8 ct Demande moyenne Demande identique à celle du sight précédent.
Spotted Sawables 4 à 8 gr Demande moyenne Demande inférieure à celle du sight précédent.
Chips 4 à 8 gr Demande moyenne Demande inférieure à celle du sight précédent.
Colored Sawables 4 à 8 gr & Colored 2,5 à 14,8 ct Demande moyenne Demande inférieure pour les 4 à 8 gr que pour les +2 ct.
Makeables High 3 gr +7 Faible demande Demande inférieure à celle du sight précédent.
Preparers Low 3 à 6 gr Faible demande Demande inférieure à celle du sight précédent.
1st Color Rejections (H-L) +11/+7 Aucune demande Demande inférieure à celle du sight précédent.
1st Color Rejections (H-L) -7+3 Aucune demande Demande identique à celle du sight précédent.

*Évolution par rapport au sight précédent

Source Idexonline