« Pas de nouvelle grande mine », la réponse à la mauvaise question

Edahn Golan

Si l’on se fiait au bon sens, les prix du taillé augmenteraient lorsque la demande se développe et que l’offre se réduit. [:]L’idée d’un repli de la demande tient à plusieurs facteurs : 1. Les diamants sont une ressource limitée. 2. Les grandes mines ont dépassé leur pic de productivité et s’épuisent lentement. 3. Aucune nouvelle grande ressource n’a été découverte récemment. Considérons qu’il faut environ 10 ans entre la découverte d’une ressource de diamants et le début d’une extraction rentable. Logiquement, l’espoir qu’une grande mine vienne raviver l’offre de diamants pendant la prochaine décennie est donc quasi-nul. Toutefois, c’est là que l’on se trompe. Une ressource importante peut démarrer sa production plus rapidement et garantir une offre stable pendant de nombreuses années – sans qu’il soit nécessaire de compter sur une découverte inattendue, avec une mise en production accélérée.

Rappelons d’emblée que les trois affirmations ci-dessus sont vraies et précises. Il faut aussi préciser que la De Beers ne complote pas en vue de sur-tarifer le taillé pour les consommateurs grâce à un «lâcher de gibier », comme certains aiment à le proclamer. La De Beers n’a absolument rien à voir avec cela.

Le problème n’est pas non plus dans la conclusion apportée, mais plutôt dans ce qu’elle implique : qu’il n’existe pas de grande ressource connue restant à exploiter. Parfois, le problème ne réside pas dans la réponse donnée, mais dans la question posée, comme ici : « Existe-t-il une ressource d’importance qui ne soit pas exploitée ou développée ? » 

Plusieurs mines sont en cours de développement, à des stades divers. Leur exploitation débutera dans les années à venir. La plupart ne sont pourtant pas très grandes. Globalement, leur production devrait avoisiner les 2 millions de carats par an. Il s’agit notamment de la mine Bunder de Rio Tinto, en Inde, une ressource de 27,4 millions de carats, qui devrait produire environ 2,5 millions de carats par an lorsqu’elle entrera en production en 2017, et le projet Renard de Stornoway Diamonds, au Canada, une ressource indiquée de 27 millions de carats, avec un plan de production de 1,6 million de carats par an à partir de 2016.

Mais lorsque l’on évoque une découverte majeure, «de classe mondiale», personne ne pense à une ressource de quelque 27 millions de carats – même si cette contribution ne sera pas négligeable. Une ressource majeure produit quatre à cinq millions de carats par an. Actuellement, il en existe environ 10 de cette envergure, dont la mine Orapa de la De Beers (environ 11 millions de carats), Argyle de Rio (environ 10 millions de carats) et Catoca en Angola (environ 7 millions de carats).

Regardez la Russie, contemplez l’avenir

Le problème n’est pas que l’absence de découverte majeure implique l’absence de toute marchandise, mais que les découvertes majeures n’ont pas encore été développées. Certes, aucune découverte majeure n’a été révélée récemment. La seule exception concerne Marange, une ressource abondante en termes de carats par tonne, mais les marchandises sont peu rentables. À part cela, aucune grande mine n’est entrée en service ces dernières années et seules quelques-unes sont attendues au cours des deux années à venir. La plus importante est la mine de Gahcho Kue, au Canada, avec une production annuelle attendue d’environ 5 millions de carats. Néanmoins, ce n’est pas non plus l’eldorado.

[two_third]Où se cache donc le successeur d’Orapa ? Réponse : dans une mine profonde en Russie. Dans sa présentation aux investisseurs de mars 2014, ALROSA a indiqué disposer d’au moins 657,5 millions de carats en réserves indiquées. Cela représente plus de quatre fois la production mondiale annuelle moyenne de diamants. Avec 308 millions de carats supplémentaires en ressources identifiées, ALROSA est assise sur près d’un milliard de carats de diamants. [/two_third][one_third_last]

« ALROSA est assise sur près d’un milliard de carats de diamants. »

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Une ressource indiquée désigne un site où la quantité estimée du gisement est bien établie. Avec une ressource identifiée, la quantité estimée est moins certaine, mais les informations géologiques et les connaissances de la situation sont suffisantes pour délimiter un gisement potentiellement rentable. Dans le cas d’ALROSA, la question n’est pas de savoir s’il y a des diamants dans la ressource identifiée, mais plutôt de combien de centaines de millions de carats elle dispose.

Les ressources identifiées d’ALROSA ne sont pas présentées à l’aveuglette. En fait, il s’agit même d’une estimation prudente. Le diamantaire russe, qui extrait environ 34 millions à 37 millions de carats par an, a estimé en 2011 ses réserves et ressources à 1,28 milliard de carats. En 2012, la société a fait passer cette estimation à 1,31 milliard de carats.

ALROSA est loin d’avoir épuisé ces ressources et le monde n’est pas encore dépourvu de cette beauté minérale. Cela ne signifie pas que le calcul des futurs prix des diamants soit faux. Bien au contraire. Même si la demande augmente, le volume total de l’extraction de diamants est relativement stable, avec quelques fluctuations prévues dans un avenir proche, lorsque Gahcho Kue et Renard seront mises en service – tandis que d’autres perdront en volume.

Quant aux ressources de plusieurs milliards de carats présentes en Russie, elles seront exploitées en temps voulu.

Source Idexonline