New York Times : « Les ventes de diamants réduites à peau de chagrin suite à des allégations de fraude »

Edahn Golan

Non, ce titre n’est pas paru à la une du quotidien le plus influent au monde, mais je pourrais le leur proposer si les membres de l’industrie n’exigent pas très rapidement qu’une action soit engagée dans la récente affaire des diamants de laboratoire. Si cette histoire fait les gros titres, la confiance des consommateurs va péricliter. L’industrie doit agir, elle doit le faire maintenant et de façon durable. Imaginez : vous ouvrez le journal et vous apprenez que le supermarché du coin vend du tofu en guise de viande. Vous allumez la télévision et on annonce au 20 heures que, depuis un certain temps, les stations-service diluent leur carburant avec d’autres liquides. Enfin, vous découvrez qu’un ami en qui vous aviez une totale confiance vous ment depuis des années sur des sujets importants. Quelle est la probabilité que vous retourniez acheter de la viande dans ce supermarché, que vous fassiez le plein d’essence dans ces stations-services ou que vous accordiez à nouveau votre confiance à cet ami ?
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Une histoire de confiance

De nombreuses personnes apprécient le tofu, se désintéressent totalement du carburant à condition que leur voiture fonctionne bien et pardonnent leurs faiblesses à leurs amis. Mais si vous aviez le choix, que feriez-vous ? Parlons franchement, lorsque vous achetez du tofu, vous voulez payer le prix du tofu. Si vous préférez la viande, vous voulez être certain de bien mettre de la viande dans votre caddie, et uniquement de la viande.

Les diamants de laboratoire ne me posent aucun problème. Non, vraiment. Ils ont leur marché et ne vont cesser de se développer. Le problème survient lorsqu’un consommateur entre dans une boutique pour acheter un diamant naturel : il doit alors être sûr qu’il acquiert bien ce qu’il désire. Les diamants de laboratoire se vendant à un quart du prix du diamant naturel, il est impensable de ressortir d’une boutique en croyant avoir acheté une pierre naturelle, en avoir payé le prix, mais finir par porter une pierre synthétique.

Les consommateurs ont le choix et ils l’exerceront à chaque fois qu’ils le pourront. Leur fidélité est de courte durée, elle se mesure à l’aune de leur confiance. Trahissez cette confiance, ils disparaîtront.

Vous considérez peut-être que la question relève moins de l’éthique que celle des diamants du conflit et qu’elle n’a pas fait baisser les ventes. Alors, vous vous trompez. Les consommateurs pensent d’abord à eux-mêmes. Une main coupée il y a 15 ans en Sierra Leone, cela a été un événement terrible, mais il est arrivé à quelqu’un d’autre. Quand un consommateur est trompé, l’affaire devient personnelle. Une escroquerie ne peut pas être comparée aux cicatrices dans les livres d’histoire, mais quand on parle de consommation, l’ordre des priorités prend un tout autre visage. C’est « moi d’abord, les autres, on verra ».

Nous pouvons agir
Outre adopter un comportement éthique, l’industrie dispose d’un large rayon d’action. Pour l’instant (et pour autant que je sache), aucune enquête officielle approfondie n’a été engagée pour découvrir, confronter et punir les responsables des 600 diamants de laboratoire non déclarés récemment identifiés par l’IGI. Quelqu’un a acheté le brut, sachant pertinemment de quoi il s’agissait. Le fabricant aurait dû le savoir aussi : les diamants de laboratoire se comportent différemment au moment du polissage. Quelle que soit leur identité, ces personnes savaient ce qu’elles faisaient.

Les dirigeants de l’industrie diamantaire peuvent et veulent approfondir la question mais ils doivent pouvoir compter sur le soutien de leurs membres.

À Anvers, Mumbai, Ramat Gan et New York, le marché doit se faire entendre et encourager vivement les représentants des organisations-cadres de l’industrie locale, des bourses et des associations de fabrication à ne pas ignorer l’affaire. Il faut leur rappeler régulièrement que l’oxygène que respire l’industrie diamantaire, c’est-à-dire l’argent durement gagné par le consommateur, pourrait, en cas d’inaction, s’envoler à tout moment vers d’autres cieux…

Appelez les responsables élus de l’industrie, envoyez-leur un e-mail ou arrêtez-les dans la rue et demandez-leur : « que fait-on aujourd’hui pour faire comparaître les contrevenants devant les tribunaux ? ».

Source Idexonline