Le temps du changement pour l’industrie du diamant – Business Excellence Seminar 2016 de la De Beers

Marianne Riou

Lundi 27 juin 2016, se tenait, à Londres, au sein du Grosvenor House Hotel, le Business Excellence Seminar de la De Beers. Le minier avait réuni ses sightholders et une partie de ses équipes pour l’occasion. [:]La thématique des conférences de la journée, outre qu’elle confirmait la passation de pouvoir entre Philippe Mellier et son successeur, Bruce Cleaver, était autrement d’actualité et visait à bousculer les idées reçues dans l’industrie diamantaire : « Innovation and transformation : sustaining success in tomorrow’s world ».

L’enjeu du séminaire, c’est Philippe Mellier, CEO sortant, qui l’annonce : « découvrir des moyens de créer un succès durable, éviter que [sa] compagnie ne devienne obsolète ou même que l’industrie du luxe ne devienne obsolète à l’heure du marché mondial. » « Regarder », « écouter », « apprendre » et se nourrir de l’expérience des éminents invités de la De Beers, voilà ce qui était proposé  aux sightholders à l’occasion de ce Business Excellence Seminar 2016.

Le challenge : un environnement changeant

Les temps changent dans l’industrie du diamant, n’est-ce-pas ? Plus personne ne peut contredire ce fait. Changements financiers et technologiques sont le pendant de l’évolution de la demande et du point de vue des  consommateurs. La vraie question c’est : comment s’y adapter ? Comment négocier ce tournant pour rester performant ? « Innovation et transformation » sont les solutions que la De Beers et ses orateurs ont avancées. Pour Mark Cutifani, « ceux qui survivront [à cet environnement changeant] ne sont ni les plus forts, ni les plus intelligents, mais ceux qui arriveront à gérer rapidement les changements et la réalité nouvelle. »

Trouver les solutions en changeant sa manière de voir

Il n’y a pas de solution miracle certes, mais des pistes et surtout un nouveau positionnement à adopter dans la perception que chacun a de son business et de l’industrie du diamant. Il faut « regarder au-delà de son secteur » d’après le professeur Michael Jacobides. Voyez comment les vins français, en créant les AOC, ou le café, en s’insérant dans le commerce équitable, ont créé valeur, rareté et demande.

Voici un condensé des solutions proposées au BES 2016, celles sur lesquelles Nick Fry, Dominic Barton, Simon Woodroffe et Dan Cobley* (liste des invités ci-dessous) se rejoignent notamment.

● Ne pas avoir peur du changement

Pour Dominic Barton, l’avantage des « petits » est qu’ils peuvent « bouger et changer plus rapidement ». Pour autant, nul ne doit redouter le changement, il est indispensable. Les pouvoirs économiques mondiaux sont en plein décalage, on a vu émerger dans les 50 dernières années 2,2 milliards de consommateurs de la classe moyenne, les villes ont pris de plus en plus de place, notamment en Asie et en Afrique, les populations vieillissent, la technologie est omniprésente. Ce nouvel environnement est un état de fait qu’il ne faut pas redouter. Les perturbations (« disruption ») ne viennent pas de l’industrie du diamant elle-même, mais du monde extérieur.

Que chacun cependant continue à faire ce qu’il maîtrise le mieux…

● Se nourrir de l’expérience, du travail des autres, dans tous les domaines

Voilà exactement ce que sont venus faire Nick Fry, Dominic Barton, Simon Woodroffe et Dan Cobley. Chacun a partagé son expérience dans son domaine et a proposé aux sightholders et professionnels de l’industrie du diamant présents d’essayer de les transposer à leur business. L’industrie du diamant n’est ni unique, ni exceptionnelle ; elle s’inscrit bel et bien dans un monde globalisé et en mouvement ; les solutions appliquées dans d’autres industries peuvent aussi lui être bénéfiques !

● Avancer ensemble

C’est en conciliant les expériences de chacun, en étant partenaires plus que concurrents, que l’industrie du diamant avancera. En comprenant les exigences des banques par exemple, ou les besoins de ses partenaires ou fournisseurs, en collaborant à tous les niveaux de son entreprise, chacun aura de meilleures chances d’avancer. Ensemble  donc ! Regardez vos salariés, vos partenaires, vos fournisseurs, vos proches comme une grande famille et partagez vos succès avec elle, associez-les à votre réussite.

● Agir et innover, sortir de sa zone de confort

Innover, c’est d’abord entreprendre différemment, cela ne se limite pas aux innovations technologiques et matérielles. C’est anticiper et proposer une nouvelle façon de voir les choses et de manager, c’est mettre en place des process, rapides, efficaces et adaptés aux objectifs de l’entreprise, c’est la relocaliser ou repenser ses ressources.

Mais innover c’est d’abord oser agir…  Simon Woodroffe le résume ainsi : « to step outisde your comfort zone : sortez de votre zone de confort », changez les règles et le monde s’offrira à vous.

N’oubliez pas cependant que, comme le dit Dan Cobley : « Les données sont le nouveau pétrole. » On ne peut plus concevoir son business sans comprendre la façon dont les technologies transforment les entreprises et les moyens de communiquer, sans se rappeler que les smartphones imprègnent notre quotidien ultra-connecté.

● Faire confiance aux jeunes, embaucher les meilleurs

C’est un point clé pour Nick Fry, qui rappelle que son business a des similitudes avec celui du diamant : les budgets exponentiels qu’il génère et la rapidité d’action nécessaire (quand un haut joaillier a besoin d’un diamant, il n’entend pas attendre 6 mois !) S’entourer des meilleurs (Lewis Hamilton pour ne citer que lui) à tous les niveaux de l’entreprise – ce qui n’a rien à voir avec le niveau d’études ! –, encourager la diversité et embaucher des personnes aux origines variées qui, ensemble, se nourriront de leurs différences.

Former des jeunes, leur faire confiance, les laisser expérimenter est une porte d’entrée. Ils sont un souffle nouveau, ils vivent avec leur époque, « ils font du business depuis leur téléphone » (Simon Woodroffe).

● Définir des objectifs clairs…

… Dont chacun dans l’entreprise doit avoir connaissance et peut suivre. Ce qui nous amène logiquement à la nécessité d’une communication claire avec l’ensemble de son staff : faire des points réguliers, être honnête sur la situation de l’entreprise, définir une ligne claire et concise, traiter ses coéquipiers avec confiance et respect.

● Se donner les moyens d’atteindre ses objectifs

Moyens humains, financiers, techniques : quels qu’ils soient, il faut investir et permettre à son équipe d’atteindre ses objectifs avec les meilleurs outils. La bonne volonté ne suffit pas, il faut… des moyens !

● Ne pas avoir peur d’échouer

Vous connaissez les FailCons ? Ce sont des conférences ou des dirigeants d’entreprise partagent leur échec et les enseignements qu’ils en ont tiré. C’est une idée partagée par Simon Woodroffe : « les gens qui réussissent sont aussi ceux qui ont échoué avant ! »

● Avoir confiance dans le talent et l’intuition

Talent et intuition : deux mots à ne pas oublier ! Ne tournez le dos ni à l’un ni à l’autre ; plus on maîtrise les choses, plus on « travaille » moins on laisse de place à la chance, or elle est aussi la clé d’un business qui marche.

Les mots magiques à retenir pour Simon Woodroffe sont ceux-ci « C’est tellement évident, pourquoi personne n’y a pensé avant ? »

Et, pour conclure, le témoignage de Nick Frey qui rappelle « pourquoi les gens achètent des Ferrari ? Ce ne sont pas les meilleures voitures ! Mieux vaut acheter une Audi. Mais Ferrari a su raconter une histoire, parler aux gens. Voilà ce que vous devez faire : changer le regard du consommateur, leur rappeler qu’un diamant… c’est un don (a gift) ! »

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Les intervenants*

Sont intervenus lors du séminaire, par ordre d’apparition :

– Philippe Mellier, CEO sortant du groupe De Beers ;

– Dominic Thurbon, co-fondateur et directeur créatif du groupe Karrikins Group ;

– Mark Cutifani, CEO d’Anglo American ;

– Nick Fry, ancien CEO et co-propriétaire de l’écurie de Formule 1 Mercedes ;

– Dominic Barton, directeur général de McKinsey  & Company ;

– Simon Woodroffe, fondateur de YO !;

– Professeur Michael Jacobides ; London Business School

– Dan Cobley, ancien directeur général chez Google UK ;

– Bruce Cleaver, CEO entrant du groupe De Beers ;

– Paul Rowley, vice-président exécutif des DBGSS (De Beers Global Sightholder Sales).