Le négoce à Anvers

Avi Krawitz

En apparence, le récent accord signé entre le Antwerp World Diamond Centre (AWDC) et ALROSA n’a pas apporté grand-chose de nouveau. [:]Bien qu’Anvers soit depuis longtemps la principale destination des exportations de la société minière russe, le contrat ne garantit pas que plus de marchandises seront expédiées là-bas. L’accord devrait plutôt être perçu comme un symbole de la place que tient Anvers sur le marché du brut, une place encore très importante.

Certains sceptiques ont considéré que l’apparition de centres d’échange de brut à Gaborone et à Dubaï aurait un impact négatif sur Anvers, surtout en raison du transfert des sights de la De Beers de Londres à Gaborone – un transfert qui ne s’est achevé que le mois dernier. Anvers étant relativement proche de Londres, la ville est devenue une plaque tournante pour les marchandises en route vers l’Inde, pour la fabrication. Certains soutiennent qu’il est désormais peut-être plus logique d’expédier les marchandises de Gaborone vers l’Inde via Dubaï, ou même en Inde directement.

Jusqu’à présent, il n’y a rien qui puisse suggérer que c’est le cas, mais il est sans doute trop tôt pour le savoir. Néanmoins, Stephane Fischler, président du AWDC, a constaté que les diamantaires allaient à Anvers non seulement pour le brut de la De Beers circulant sur le marché secondaire, mais aussi pour des marchandises provenant de sources multiples.

En fait, Anvers a eu moins recours aux marchandises de la De Beers au cours de ces dernières années, notamment parce que la société minière a réduit le nombre de sightholders basés à Anvers.

En revanche, ALROSA a augmenté son offre de brut à Anvers, les exportations de la société vers la Belgique augmentant de 31 % en glissement annuel à 1,75 milliard de dollars (57,23 milliards de roubles russes) au cours des trois premiers trimestres de 2013. Selon les estimations de Rapaport, la Russie a représenté environ 18 % des importations de brut de la Belgique pendant la même période. Le AWDC ne publie pas la liste des partenaires de la Belgique pour son commerce de brut, comme il le fait pour son commerce de taillé.

[two_third]Par conséquent, l’accord AWDC-ALROSA a servi à rappeler un partenariat solide qui existe déjà. Les parties ont exprimé leur intention de contribuer au développement d’un marché concurrentiel en Russie et à la promotion des diamants russes à Anvers, ainsi que leur intention d’échanger des renseignements sur le marché et de participer à la formation sur le triage et la classification des diamants des étudiants russes au HRD Antwerp. Ces objectifs concordent avec le plan stratégique 2012 du AWDC, consistant à faire d’Anvers une plaque tournante des échanges et un centre d’éducation et de connaissances sur les diamants.[/two_third]

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« Par conséquent, l’accord AWDC-ALROSA a servi à rappeler un partenariat solide qui existe déjà. »

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Leur relation ne devrait pas être sous-estimée non plus. Après tout, ALROSA est le plus grand producteur de diamants, en termes de volume, à approvisionner le marché. Le fait que la Belgique représente sa plus grande clientèle est significatif, d’autant plus que les centres d’échanges se font concurrence pour les marchandises.

[two_third]En fin de compte, les acheteurs iront là où se trouvent les diamants, ce qui a été la stratégie marketing ayant permis au Botswana de se développer en tant que plaque tournante des échanges. Dubaï, pendant ce temps, s’est appuyé sur sa forte position en tant que passerelle vers l’Est, ainsi que sur son exemption d’impôts et ses fortes capacités logistiques, pour augmenter ses exportations de brut d’à peine 600 millions de dollars en 2003 à 6,9 milliards de dollars en 2013. Mais bien que le Dubai Diamond Exchange (DDE) organise des tenders de brut presque tous les mois, il faut encore qu’il séduise les sociétés minières par de belles paroles pour qu’elles s’engagent à vendre leurs marchandises directement à Dubaï sur le long terme.[/two_third]

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« Faire d’Anvers une plaque tournante des échanges et un centre d’éducation et de connaissances sur les diamants. »

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Anvers a cette valeur ajoutée. ALROSA a prévu, sur une base régulière, des ventes aux enchères de grosses pierres à Anvers en 2014, afin de compléter ses ventes aux enchères à Ramat Gan, Hong-Kong, New York et Moscou. Rio Tinto Diamonds, Dominion Diamond Corporation, Petra Diamonds, Gem Diamonds et Lucara Diamond Corporation ont toutes des bureaux de vente à Anvers. Cette semaine, Anvers a organisé son premier tender de brut en provenance des mines de Marange au Zimbabwe, après que l’Union européenne ait levé les sanctions à l’encontre de la Zimbabwe Diamond Development Corporation (ZMDC) en septembre.

Fischler a constaté qu’Anvers avait aussi une solide base financière et pouvait maintenir un stock important de brut dans la ville. Bien qu’il ait admis que les grosses sociétés commerciales et de fabrication sont en train d’ouvrir des bureaux à Dubaï, ces dernières maintiennent tout de même leurs opérations à Anvers. Fischler a ajouté que le AWDC travaille en ce moment sur une offre de mesures incitatives pour que les sociétés ancrent leur capital à Anvers de manière transparente et efficace. Le AWDC espère aussi fournir des services bancaires plus attractifs dans la ville – surtout pour les petites et moyennes entreprises qui, selon Fischler, ne vont pas à Dubaï.

[two_third]Bien entendu, la croissance de Gaborone et Dubaï n’est pas seulement un défi pour Anvers, car  elle a des conséquences sur les centres d’échange de brut établis – y compris Ramat Gan, Mumbai et Johannesburg. Mais comme le constate Fischler, « l’industrie n’est pas un jeu à somme nulle. La croissance d’un centre ne signifie pas une baisse d’activité pour les autres. » Il y a, sans aucun doute, de la place pour tout le monde. En fait, l’apparition de centres diamantaires en compétition est un développement important et palpitant qui, en fin de compte, améliorera l’industrie, comme l’a exprimé cette colonne dans le passé (lire l’éditorial, « Des centres diamantaires compétitifs », publié le 22 mars 2013).[/two_third]

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« Après tout, les acheteurs ont tendance à aller là où les diamants se trouvent. »

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Mais les centres les plus anciens ne peuvent pas se contenter d’adopter une attitude complaisante et, étant donné sa position de leader historique dans le négoce du brut, il semble qu’Anvers ait le plus à perdre. Qui plus est, le AWDC semble pleinement conscient de sa vulnérabilité et résolu à ne pas réduire sa part de marché. Telle était la nature de son accord avec ALROSA. Tant qu’Anvers est capable de maintenir sa relation avec les plus gros fournisseurs de brut, son importance devrait être préservée sur le marché. Après tout, les acheteurs ont tendance à aller là où les diamants se trouvent.

Source Rapaport