L’anticipation est payante… en RDC et dans l’industrie du diamant

Edahn Golan

Il faut féliciter l’ONU ! Le groupe rebelle M23, de République démocratique du Congo, vient d’annoncer qu’il déposait les armes, mettant ainsi fin à une longue insurrection. [:]Les combats, opposant rebelles et forces du gouvernement, auraient coûté la vie à des millions de personnes et donné lieu à des crimes horribles, notamment des viols massifs de femmes et même d’enfants âgés d’à peine 10 ans. Personne n’imagine que les violences vont prendre fin en RDC mais l’étape est importante. Au fil des années, les tentatives se sont multipliées pour trouver une issue au conflit, y compris une loi adoptée aux États-Unis. La disposition en matière de minéraux du conflit de la Loi Dodd-Frank Wall Street Reform and Consumer Protection Act vise, dans son article 1502, à mettre fin aux conflits violents en RDC, qui ont été financés en partie par des minéraux comme l’or et le tungstène, selon certains rapports.

Néanmoins, ce ne sont ni les États-Unis ni la loi sur la réforme de Wall Street qui ont mis fin à la guerre, du moins pas directement. Une grande part de la considération revient à l’ONU. Pendant des années, ses forces de maintien de la paix sont restées spectatrices lors des affrontements entre adversaires. Cette attitude passive a engendré des pertes massives de vies humaines et une véritable dévastation dans d’autres parties de l’Afrique, comme au Rwanda voisin.

Le changement est intervenu récemment. L’ONU a choisi d’agir en déployant une brigade de combat, qui a repoussé les rebelles et permis que s’installe la trêve. Cette évolution se révèle majeure dans la stratégie de l’ONU. L’industrie du diamant pourrait peut-être s’y intéresser.

Pendant des années, l’industrie a exhorté l’ONU à engager ce genre d’intervention, au Zimbabwe par exemple. Il est vrai que la situation y est différente à bien des égards. Pour résumer, le KP a été chargé de gérer la violence dans le pays, avec pour obligation de bloquer les exportations de diamants. La situation n’est due qu’à l’incompétence de la communauté internationale. Cette inaptitude peut être corrigée, comme nous le voyons en RDC. La question qui resurgit est de savoir s’il faut agir. N’oublions pas que l’ONU a fait pression sur le Zimbabwe. Elle était en mesure d’imposer des sanctions et ne l’a pas fait.

La porosité des frontières de la RDC permet, chaque année, que des centaines de milliers, voire des millions de carats de brut passent en contrebande. Le pays est inscrit sur la liste des sujets à traiter des ONG, mais guère plus. En réalité, la RDC présidait le KP, alors même que ce trafic de masse était connu de tous. Est-il possible que les États-Unis, le Canada, l’Australie et d’autres pays, qui ont poussé le KP à agir contre le Zimbabwe, ne se soucient pas suffisamment du peuple congolais ? Les fuites massives de la correspondance diplomatique américaine (WikiLeaks) et l’espionnage de la NSA démontrent que les voies de la diplomatie sont bien mystérieuses.

Quant à la Loi Dodd-Frank, qui oblige les entreprises à mener une « enquête raisonnable » sur les origines des minéraux de leurs produits, elle s’est révélée accessoire, improductive et inefficace.

Face à des Congolais confrontés à la reconstruction de leur destin, le monde doit tenir compte de sa façon d’agir dans les autres conflits. L’industrie peut aussi en tirer des leçons : l’anticipation est payante. Elle devrait continuer à se concentrer sur la gestion des affaires, mais aussi sur l’auto-régulation. Objectif : lutter contre les activités illégales et immorales, comme démasquer ceux qui travaillent avec des marchandises synthétiques non déclarées.

Source Idexonline