Grosseur et qualité, des caractéristiques recherchées

Avi Krawitz

Les diamants extraordinaires sont devenus la coqueluche des amateurs. Parallèlement à un marché qui vivote, les négociants au salon de Bâle de cette semaine ont enregistré une forte demande pour le très haut de gamme.[:]Par conséquent, lorsque les enchères de bijoux vont migrer de New York à Genève à la mi-mai, les diamants spéciaux mis en vedette devraient atteindre des prix très élevés, voire des records.

La tendance apparaît clairement depuis quelque temps. Certaines catégories, comme les couleurs fantaisie, maintiennent leur orientation à la hausse depuis dix ans et ce, même lors de la crise de 2008. ‎La situation est apparue clairement il y a quelques semaines, aux enchères de Christie’s et Sotheby’s ‎à New York. Les deux établissements ont vendu leurs  lots à hauteur de 82 %. Tous deux ont annoncé l’obtention de prix record pour leurs articles respectifs les mieux vendus.

Ce sont ces pierres qui font des diamants le minéral le plus précieux. Aucune autre ressource n’égale les 1,135 million de dollars par carat qu’a obtenu le Princie Diamond (un diamant rose intense, de taille coussin, de 34,65 carats) chez Christie’s. Cela équivaut à payer 1,135 million de dollars pour 6,5 millimètres de matière.

Certes, la provenance joue un grand rôle dans ces résultats. Du fait de ses origines indiennes, dans la région de Golconde, le Princie Diamond serait attribué à la famille royale d’Hyderabad. Il a été vendu aux enchères pour la première fois en 1960. Le Nizam de l’Hyderabad l’a alors cédé à Van Cleef & Arpels pour seulement 46 000 GBP. Ainsi que le note Christie’s, « cela équivaut à 1,3 million de dollars d’aujourd’hui et souligne les opportunités d’investissement considérables que permettent les diamants. » La pierre a ensuite été rebaptisée d’après le Prince de Baroda, à l’occasion de sa présentation par le joaillier à la famille princière. ‎

Des histoires similaires circulent à propos des belles pièces qui ont appartenu à Elizabeth ‎Taylor. Elles ont battu des records lors de leur vente en décembre 2011 chez Christie’s à New York. La concurrence est féroce entre les maisons d’enchères pour obtenir ces pierres et bijoux spéciaux qui suscitent tant d’intérêt.

La prochaine série de ventes aux enchères de bijoux, qui aura lieu à Genève à la mi-mai, ne devrait pas déroger à la règle. ‎

Sotheby’s vante ses « joyaux exceptionnels, issus de la collection de Gina ‎Lollobrigida, la légende du 7ème art », ainsi qu’un assortiment impressionnant de pièces nobles et historiques. Christie’s ‎tient la tête avec un diamant sans défaut, en forme de poire, de couleur D, de 101,73 carats, extrait il y a environ sept ans de la mine Jwaneng de la De Beers au Botswana. La pierre est mise en vente pour la première fois. Christie’s en attend plus de 20 millions de dollars ce qui, à environ 197 000 dollars/ct, pourrait le classer parmi les diamants incolores les plus chers jamais vendus aux enchères.

La provenance n’est donc pas constamment l’élément essentiel. Le plus souvent, ces bijoux sont évocateurs en soi. Bien sûr, certains négociants à Bâle ont affirmé que les acheteurs des grands lots mis aux enchères à New York auraient pu les obtenir pour moins cher si la pierre avait été disponible sur le marché. D’autres ont toutefois fait valoir que la plupart des prix d’adjudication reflètent ceux observés actuellement sur le marché.

« Les enchères de New York ont donné un indice sur la situation du marché, ce n’est pas un baromètre exact, a déclaré Marc Lazar, un fournisseur de bijoux en diamants, de diamants blancs et de couleur fantaisie rares, de premier ordre. Les personnes riches considèrent les diamants rares comme une réserve de valeur. » La plupart des exposants de Bâle, qui est considéré comme l’un des plus grands salons du marché, en ont convenu. Ils ont toutefois souligné que le public achète ces bijoux en tant que consommateurs, et non comme des investisseurs.

Comme l’a noté Barry Berg, de William Goldberg, un négociant et joaillier haut de gamme, « Les acheteurs veulent de beaux bijoux à porter. Les consommateurs recherchent de belles pièces. »

Les négociants considèrent que les acheteurs agressifs des enchères, comme Laurence Graff (qui arpentait également les allées de Bâle), paient des prix record car ces achats augmentent la valeur de leur portefeuille. Ils constatent également une réelle demande des consommateurs pour ce type d’article.

Des exposants à Bâle ont affirmé que le marché est poussé par la richesse des économies émergentes d’Extrême-Orient, tels que la Grande Chine, la Malaisie et l’Indonésie, mais aussi par le Moyen-Orient. Les détaillants de luxe européens auraient également recherché des pierres uniques au salon et de nombreux exposants ont acheté ces marchandises.

Les négociants achètent pour leur stock, convaincus qu’ils finiront par vendre ou satisfaire les commandes de leurs clients. Certes, les ventes semblent aisées. Pourtant, les fournisseurs remarquent qu’ils ont affaire à une clientèle bien mieux informée que partout ailleurs sur le marché. Les connaissances du public se sont considérablement accrues à mesure que l’intérêt pour ces marchandises progressait ces dernières années.

Or, elles demeurent rares et la concurrence pour les marchandises de qualité s’intensifie. Pour la promotion de sa prochaine vente à Genève, Christie’s a rappelé les estimations du GIA : moins de 600 diamants bruts extraits chaque année donneraient des diamants sans défauts, de couleur D, compris entre 1 et 2 carats.Les chances de trouver du taillé D sans défaut, de plus de 10 carats, sont beaucoup plus faibles.

Bâle, à l’instar des enchères de New York qui l’ont précédé, a révélé un marché actif pour les marchandises sans défaut, de couleur D, d’un minimum de 10 carats. Les couleurs fantaisie, en particulier les roses et bleus intenses, mais aussi les couleurs uniques telles que les oranges, verts et violets et les tailles fantaisie bien taillées, de haute qualité, sont également très demandés. ‎

Or, il ne suffit pas d’un segment demandé sur le marché pour garantir le succès d’un salon, même à Bâle, où l’on n’a constaté ni ventes en plein essor ni énergie positive débordante. Dans l’ensemble, les exposants se sont interrogés sur l’intérêt d’y participer, compte tenu des coûts élevés. L’événement a toutefois montré des manifestations de confiance pour le très haut de gamme, même si le reste du marché reste prudent. La tendance est de bon augure pour les prochaines semaines dans les maisons d’enchères. Au vu de la situation actuelle, les diamants et bijoux rares, audacieux et esthétiques qui sont proposés devraient continuer à atteindre des prix record. ‎

Source Rapaport


Photos Rapaport, avec l’aimable autorisation de Sotheby’s et Christie’s