Couleurs fantaisie, mode d’emploi

Rough and Polished

Bien que la majorité des diamants soient  incolores ou légèrement teintés de jaune, les plus célèbres au monde sont des diamants de couleur ˗ notamment le diamant bleu, Hope, et le diamant rouge, Moussaieff ˗, écrit Charlotte McLeod dans un article publié sur resourceinvestingnews.com.[:]

Ces diamants de couleur ne représentent que 2 % du total. Ils atteignent régulièrement des prix plus élevés que les incolores.

Mais, comment comparer les diamants de couleur à leurs homologues moins clinquants ? Quant aux investisseurs, s’agit-il pour eux d’un bon placement ?

Pourquoi les diamants ont-ils des couleurs différentes ?

Les diamants peuvent prendre pratiquement n’importe quelle couleur : jaune, brun, rose, rouge, bleu, vert, gris, violet, orange ou même noir. Qu’ils soient incolores ou colorés, leur formation est identique : il s’agit de la cristallisation de molécules de carbone sous haute pression.

Toutefois, lorsque des atomes spécifiques sont pris au piège dans la structure cristalline au cours de l’opération, le diamant qui en résulte se colore. Ainsi, les diamants jaunes sont dus à de l’azote, pris au piège de la cristallisation. Ceci explique pourquoi on trouve généralement les diamants de même couleur au même endroit ; si le sol est riche d’un élément particulier, celui-ci est donc susceptible de s’intégrer au diamant lors de sa formation.

Certains diamants de couleur, comme les diamants verts, résultent d’une radiation naturelle, tandis que d’autres, comme les rouges, les bruns et les roses, sont issus d’irrégularités structurelles, dues à une pression plus élevée lors de leur formation. Le type de taille choisi ou la fluorescence, c’est-à-dire la lueur émise par un diamant après l’absorption de la lumière ou d’un autre rayonnement électromagnétique, ont aussi un impact mineur sur la couleur.

Diamants de type I et II

Comme nous l’avons déjà mentionné, la plupart des diamants sont donc incolores ou affichent une teinte jaune, signe qu’ils contiennent de l’azote. Ils sont alors classés dans la catégorie des diamants de type I, puis subdivisés en types IaAB, IaA, IaB et Ib.

Les diamants colorés ne contiennent quasiment pas d’azote. Ils appartiennent à la catégorie de type II. Cette dernière inclut également des subdivisions : IIa et IIb. Les diamants de type IIa peuvent être incolores, bruns ou roses ; dans la mesure où ils sont presque entièrement constitués de carbone, ils représentent le type le plus pur. Ceux de type IIb contiennent du bore, en plus du carbone. Ils sont de couleur bleue.

Classement des couleurs

La plupart des laboratoires de classement s’appuient sur l’échelle du Gemmological Institute of America (GIA) pour évaluer la couleur des diamants de type I, considérés comme la gamme de couleur « normale ». Sur cette échelle, les diamants reçoivent une lettre de D à Z, D qualifiant une pierre incolore, Z un jaune clair ou un brun ; les diamants classés D sont les plus rares et les plus précieux. Certains détaillants ne proposent pas de pierres classées en dessous en raison d’une demande insuffisante.

Toutefois, les diamants colorés – également appelés « couleurs fantaisie » – n’entrent pas dans l’échelle de classement du GIA. Ils sont classés « suite à la mesure de la teinte, de la saturation, du ton ou de la valeur (de claire à foncée) et de la répartition de l’uniformité de couleur » et sont qualifiés par une description plutôt que par une lettre. Contrairement aux diamants ordinaires, pour lesquels le poids-carat, la pureté, la couleur et le type de taille (les 4C) sont d’égale importance, ceux-ci sont déterminés par leur couleur.

La teinte, la saturation et le ton caractérisent une couleur. La teinte la qualifie ; le ton donne la mesure de sa transparence ; quant à la saturation, elle décrit son intensité.

Au vu de la multiplicité de ces facteurs, le classement des couleurs fantaisie peut se révéler plus difficile encore que celui des diamants ordinaires ; d’autant plus que des caractéristiques comme la teinte ne sont pas toujours aisées à définir. Ainsi, un diamant peut être vert bleuté, et non pas simplement bleu ou vert.

Il existe également six catégories de saturation : fantaisie claire, fantaisie, fantaisie intense, fantaisie sombre, fantaisie profonde et fantaisie vive. Certains détaillants, comme Leibish & Co., décomposent encore ces catégories en attribuant une note de 1 à 10, le chiffre 1 indiquant une couleur faible et 10 une couleur forte. Dès lors, un diamant peut être classé orange fantaisie avec une note de 8 à 10, signe qu’il est plus proche d’une fantaisie intense que d’une fantaisie claire.

La classification des diamants, qu’ils soient ordinaires ou fantaisie,  repose sur une comparaison avec tout un ensemble de « pierres étalon », chacune représentant une description de couleur particulière ou une lettre sur l’échelle du GIA. Le classement étant quelque peu subjectif, les pierres sont habituellement examinées par plusieurs personnes.

Investir dans des couleurs fantaisie

L’industrie souffre actuellement de la faiblesse de la demande et de marges serrées, mais les perspectives à long terme sont généralement qualifiées de positives. Les couleurs n’y font pas exception.

Leibish Polnauer, président et fondateur de Leibish & Co., a déclaré à Forbes début 2013 que, ces dix dernières années, la valeur des couleurs fantaisie avait progressé bien plus que celle des autres investissements. Selon lui, « une fantaisie jaune de cinq carats a augmenté de 180 % en valeur entre 2001 et 2011 », tandis que l’action de Berkshire Hathaway (au NYSE : BRK.A) « a pris 52 % au cours de cette même période de 10 ans » et que Coca-Cola (au NYSE : KO) « a gagné 42,5 %. »

Dans un entretien accordé à Diamond Investing News, Ziad Al-Ahmadi, de Matrix Diamond Technology, une société anversoise spécialisée dans l’analyse, la taille et le traitement de brut, a, dans une certaine mesure, corroboré l’avis de Leibish Polnauer. Ziad Al-Ahmadi a noté que la découverte de couleurs fantaisie dans le sol, tout comme la création de nouvelles mines, avaient diminué, deux facteurs qui auraient contribué à l’augmentation substantielle des prix ces 10 dernières années. Il a également rappelé de bien tenir compte du taillé en circulation. Les investisseurs doivent donc garder à l’esprit que, même si la nature produit de moins en moins de ces diamants, il n’y a pas de raison que les couleurs fantaisie taillées ne réintègrent le marché (lors d’un héritage par exemple : le diamant peut être revendu.)

Bien entendu, rien n’est moins sûr. La simple logique de l’offre et de la demande suggère, pour le moment, que les prévisions de Leibish Polnauer devraient se vérifier. Les diamants colorés sont de plus en plus populaires : l’offre diminue et un nombre croissant d’acteurs majeurs du marché se détournent de l’industrie, de crainte d’évoluer dans un secteur trop limité. Harry Winston (au TSX : HW, au NYSE : DRC) a récemment accepté de régler à BHP Billiton (au NYSE et à l’ASX : BHP, au LSE : BLT) 500 millions de dollars pour sa participation de 80 % dans la mine Ekati ; la rumeur veut que Rio Tinto (à l’ASX, au NYSE et au LSE : RIO) axe sa stratégie dans la même direction. Ces facteurs, combinés à l’absence de méthode sûre pour prévoir le moment où le taillé fantaisie sera vendu, montrent que le moment est venu pour les investisseurs d’entrer en jeu.

Quelles sont les sociétés qui extraient des couleurs fantaisie ?

Interrogé sur la localisation des couleurs fantaisie, Ziad Al-Ahmadi a noté que la majeure partie est extraite dans trois régions principales : l’Australie, la Russie et l’Afrique du Sud. Il a également noté que plusieurs sociétés réalisent un travail important en la matière.

Rio Tinto se décrit comme « le premier fournisseur mondial de diamants naturels de couleur » et sa mine australienne d’Argyle en est la plus grande source au monde, en particulier pour les diamants champagne, cognac et roses, qui jouissent d’une grande popularité. Plus tôt dans l’année, la société a annoncé avoir découvert le plus gros diamant brut rose d’Australie à Argyle ; même si sa valeur de 12,76 carats a été atténuée suite à la découverte de défauts internes lors du polissage, sa découverte demeure importante. Argyle devrait rester en service au moins jusqu’en 2019.

Le Russe Alrosa, quant à lui, détient le monopole de l’extraction de diamants en Russie et représente, en termes de valeur, 25 % de la production mondiale. Acteur majeur du marché, la société a récemment signé un accord de long terme, pour un montant d’au moins 60 millions de dollars, afin de fournir une filiale de Tiffany & Co en brut. Sur son site Web, il est indiqué qu’en cas de découverte de diamants « d’une couleur rare, combinée à une grande pureté ou à des inclusions uniques ou encore à des contours cristallographiques », elle se doit de les présenter à un comité du ministère russe des Finances.

Lucara Diamond (au TSX et au NASDAQ : LUC), tout nouveau producteur de diamants, est l’unique propriétaire de la mine Karowe au Botswana ; il détient également une participation de 75 % dans le projet Mothae, situé au Lesotho, un pays enclavé en Afrique du Sud. Ces deux actifs constituent des atouts de poids qui ont « régulièrement produit de grosses pierres de type IIa», selon le site Web de la société. Début novembre, Lucara a annoncé avoir extrait un diamant bleu de type II de 9,46 carats à la mine Karowe. Le diamant s’est vendu moins d’un mois plus tard pour 4,5 millions de dollars. Ziad Al-Ahmadi a mis l’accent sur l’importance de la découverte, précisant que le diamant moyen de 10 carats se vend « au maximum 100 000 dollars ».

Source Rough&Polished