Avi Krawitz : « Oui, un indice des diamants est possible »

Marianne Riou

Avi Krawitz, pourriez-vous vous présenter et nous résumer votre carrière ?

J’ai grandi à Johannesburg, en Afrique du Sud, où j’ai étudié la finance d’entreprise à l’Université de Wits.[:] J’ai déménagé en Israël en 2002 et j’y vis toujours. Mes parents et mes deux frères, eux, sont retournés en Afrique du Sud. J’ai donc une très forte dualité en moi, liée à ces deux pays. Elle m’a été bien utile, compte tenu de la diversité de l’industrie du diamant et du fait que ce sont deux centres diamantaires d’importance historique.

Malgré mon passé d’auteur et même si je n’ai pas grandi dans l’industrie, j’ai appris à aimer les diamants. Je peux comprendre que les femmes en soient folles. Qui sait, en tant que célibataire, cela pourrait peut-être même un jour me rendre service.

Comment êtes-vous arrivé chez Rapaport ? Et si vous êtes un nouveau venu dans cette industrie, parlez-nous de vos études dans ce domaine très spécifique.

Ma carrière dans le journalisme et les diamants a débuté en Israël. Avant d’entrer chez Rapaport en 2007, j’étais journaliste d’entreprise. Je couvrais les industries locales des hautes technologies, du tourisme et de l’aviation, ainsi que les finances pour The Jerusalem Post. Toutefois, vu les difficultés que l’on rencontre actuellement dans ce métier, j’ai eu l’impression que je devais me spécialiser pour survivre. Bien sûr, il était très intéressant de couvrir un tel éventail de sujets. Mais j’étais frustré. J’en apprenais peu sur beaucoup de choses, et j’étais incapable de maîtriser un domaine particulier.

Ainsi, après avoir quitté le Post, j’ai entendu dire que Rapaport cherchait un auteur. J’ai sauté sur l’occasion. J’ai rencontré Martin Rapaport, le président du groupe, et j’ai su que je pouvais associer mon intérêt pour la rédaction professionnelle à la possibilité d’acquérir des connaissances approfondies sur une industrie fascinante.

Dès le début, j’ai vu que la combinaison était idéale pour moi. Au fil des ans, je me suis documenté un peu plus pour chaque article que j’ai écrit. Mais surtout, j’ai eu le privilège d’aborder l’industrie sous un angle unique, grâce à mon association avec Rapaport.

Pourriez-vous nous présenter Rapaport et Diamonds.net ?

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Rapaport est un fournisseur de services à valeur ajoutée pour l’industrie du diamant. En tant que telle, la société s’est développée et a fini par intégrer un certain nombre d’unités commerciales, qui se complètent et évoluent constamment.

Il s’agit notamment du RapNet® Diamond Trading Network, une plate-forme d’abonnés, sur laquelle acheteurs et fournisseurs peuvent interagir. RapNet présente des cotations quotidiennes pour plus de 1 million de diamants, d’une valeur de 6,6 milliards de dollars, et regroupe 12 000 membres dans 80 pays.

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« Rapaport est un fournisseur de services à valeur ajoutée pour l’industrie du diamant. Parmi les initiatives les plus intéressantes de Rapaport, citons Rapaport Fair Trade. »

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La division des services d’information est surtout connue pour sa liste des prix Rapaport, qui a été créée en 1978. Il s’agit de la principale source de l’industrie pour les prix des diamants et les informations de marché. Elle est complétée par le magazine mensuel Rapaport et le portail Internet diamonds.net. Chacun propose des mises à jour approfondies, d’une importance majeure, sur les développements de l’industrie. En outre, notre rapport hebdomadaire et notre rapport mensuel présentent les tendances et les analyses ciblées du marché. Ce mois-ci, ils sont proposés dans de nouveaux formats exceptionnels.

La division Enchères de Rapaport organise des enchères pour des pierres uniques, des mêlées et des bijoux, à divers endroits dans le monde. Les enchères répondent aux besoins de la communauté internationale en termes de liquidités ; elles offrent aussi des opportunités d’achat sans précédent. Le groupe propose également des services d’expédition pour la certification des diamants, dans les laboratoires du GIA aux États-Unis, par le biais du GIA LabDirect.

Parmi les initiatives les plus intéressantes de Rapaport, citons Rapaport Fair Trade. Cette ressource est d’une importance capitale pour les acheteurs de bijoux et les membres du commerce des bijoux et des diamants qui se préoccupent de l’environnement social (www.rapaportfairtrade.com). Ce projet initiative prévoit notamment d’élaborer une certification complète de la source.

Rapaport est une « institution » dans cette industrie. Surtout en ce qui concerne le prix des diamants, si tant est que l’on puisse publier un indice des prix… Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ces prix et sur la particularité de ce secteur, où il n’existe pas de « barème », comme c’est le cas pour d’autres matières premières ? Comment obtenez-vous vos renseignements ? Comment Rapaport a-t-il acquis une telle légitimité ?

Chaque diamant a son prix. À la différence d’autres matières premières, il n’existe pas de tarif uniforme, comme pour une once d’or, d’argent ou de platine. Les prix sont donc organisés et structurés de façon unique.

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Rapaport a été la première société à formaliser et publier les prix des diamants de manière structurée. Les listes de prix Rapaport représentent l’avis de Rapaport sur les cours vendeurs supérieurs, en espèces, pour différentes catégories. Ces prix peuvent être sensiblement supérieurs aux prix réels des transactions ; il est fréquent que, sur le marché, les échanges se fassent à un prix inférieur.
MRAP

La liste de prix Rapaport propose des indications qui peuvent servir de base lors des négociations, pour estimer la valeur d’un large éventail de grosseurs de pierre et de qualités. RapNet, d’autre part, donne accès en temps réel aux cours vendeurs de plus de 1 million de diamants figurant sur la plate-forme. Ainsi, l’indice RapNet (RAPI™), que nous citons dans nos évaluations de marché, s’appuie sur l’ensemble le plus complet de données sur le taillé, disponibles sur le marché.

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« Les listes de prix Rapaport représentent l’avis de Rapaport sur les cours vendeurs supérieurs, en espèces, pour différentes catégories. Ces prix peuvent être sensiblement supérieurs aux prix réels des transactions. »

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Donc, la réponse est oui. Un indice des diamants est possible. Le marché a vraiment besoin des informations fiables qu’apporte le RAPI. Les tendances qui se dessinent sur RapNet sont complétées par un recueil de renseignements cohérents sur le marché, effectué dans tous les centres de négoce dans le monde. Rapaport a des bureaux à New York, Las Vegas, Mumbai, Surat, Ramat Gan, Anvers, Shanghai et Hong Kong. La société emploie des personnes chargées de recueillir les informations qui affectent le marché tous les jours.

Qu’est-ce qui vous intéresse et fait que vous demeurez attaché au cœur de l’industrie du diamant ?

Je crois en l’efficacité des marchés. J’aime que cette industrie soit en constante évolution, lancée vers cet objectif. Je n’aurais jamais imaginé qu’une si petite industrie puisse être si diverse et si dynamique. Et c’est un beau produit, qui rend les gens heureux. C’est très agréable de travailler dans ce domaine.

Quels sont, selon vous, les opportunités et les défis de l’industrie à court et à long terme ?

Il existe des opportunités sur tous les marchés dans notre industrie car il y a toujours un nouveau flot de personnes qui cherche à acheter des diamants. Bien sûr, la Chine représente la plus forte opportunité de croissance, mais elle est aussi synonyme de plus grande concurrence. En tant que journaliste, je trouve cette dynamique tout à fait passionnante.

La volatilité de ces cinq dernières années devrait persister. Il s’agit d’un énorme défi pour tout le monde. Il faut aussi mieux gérer la déconnexion entre les prix du brut et du taillé, que l’on constate depuis la crise de 2008-2009. Le défi est grand pour les fabricants qui achètent du brut et vendent du taillé.

Si l’on creuse un peu, on voit que l’intégrité éthique de l’industrie pose aussi d’énormes défis. Il est urgent de développer un approvisionnement éthique dans la filière, qui tienne compte des violations des droits de l’homme.

Vous rentrez tout juste d’un voyage en Yakoutie. Comment considérez-vous l’avenir des sociétés minières, en particulier d’ALROSA ?

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Il me semble qu’il existe deux écoles de pensée chez les sociétés minières. Les miniers de diamants, pur sucre, qui incluent des sociétés comme ALROSA, Dominion Diamond Corporation et Petra Diamonds, cherchent à générer de la valeur grâce à la production et à une hausse de prix attendue. La De Beers et, à un certain degré, Rio Tinto, utilisent des initiatives de marque fortes. Cela me paraît être une approche plus anticipative en matière d’essor des prix à long terme. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse, mais la différence est intéressante en termes de philosophies.

Je crois en l’importance d’une image de marque forte. Pour moi, l’évolution sera passionnante dans les années à venir. Il faut dire qu’il existe très peu de grandes marques de diamants. Reste à savoir si c’est aux sociétés minières de soutenir la marque ; c’est un sujet tout à fait différent.

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« Je crois en l’importance d’une image de marque forte. Il faut dire qu’il existe très peu de grandes marques de diamants. »

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Quant à ALROSA, elle ambitionne de devenir le plus grand minier de diamants, en termes de chiffre d’affaires, d’ici 2018. Elle semble d’ailleurs vouloir augmenter sa production pour atteindre cet objectif. La De Beers prévoit de maintenir ses niveaux dans les années à venir, mais ALROSA se propose d’augmenter sa production annuelle d’environ 10 % ces 5 prochaines années.

Du point de vue du marché, le volume n’a d’importance que si les marchandises sont solides et que leurs prix sont justes et raisonnables. Alors, je ne pense pas que quiconque s’inquiète particulièrement pour l’avenir de l’industrie minière. La question la plus pressante est la rentabilité, plus avant dans la filière. Les fabricants devront notamment se montrer plus disciplinés dans leurs achats de brut aux sociétés minières.

Quels sont les objectifs du groupe Rapaport à court terme ?

Le groupe Rapaport croit dans le développement de marchés équitables, transparents, efficaces et concurrentiels pour les diamants et les bijoux. Nous entendons donc avancer dans cette voie.

Avez-vous des projets personnels, dont vous aimeriez nous faire part ?

J’essaie de garder un bon équilibre entre ma vie professionnelle et ma vie personnelle. J’essaie aussi de mener une vie saine. Mes projets personnels sont donc généralement totalement indépendants de l’industrie et concernent mes passions : l’écriture créative, la guitare et la natation. Je rêve de traverser la Manche à la nage, mais ma participation aux salons m’empêche de m’entraîner. Il faudrait installer davantage de piscines lors des rencontres commerciales !

Propos recueillis par Marianne Riou pour Rubel & Ménasché