Plus de précision et de cohérence dans les certifications de la De Beers

Avi Krawitz

En février, nous apprenions que l’International Institute of Diamond Grading and Research (IIDGR) lançait son programme de certification générique des diamants, une annonce qui n’a pas surpris grand-monde mais qui n’est pas passée inaperçue. [:]Grâce à cela, le groupe De Beers est entré dans ce qui est sans conteste le segment le plus controversé de la chaîne de distribution des diamants. En effet, depuis quelques années, les craintes sont toujours plus vives quant à la cohérence et aux normes de certification – ou à leur absence.

L’arrivée de l’IIDGR dans la certification diamantaire est un prolongement de son activité pour la marque Forevermark. D’autre part, son unité commerciale est chargée du développement des machines de détection des synthétiques de la De Beers : DiamondSure, DiamondView, DiamondPlus et Automatic Melee Screening (AMS).

Jonathan Kendall, le président de l’IIDGR, espère exploiter ces nouvelles activités à mesure que l’unité de certification se développera, tout en maintenant son axe sur ce qu’il entend être son mandat essentiel : maintenir la confiance dans les diamants.

Rapaport News : Dans quel contexte évolue l’IIDGR ?

Jonathan Kendall : L’IIDGR est effectivement devenu une activité à part entière en 2011, lorsque nous avons lancé le marketing interne de notre équipement de détection des synthétiques. Jusqu’alors, cet équipement était vendu par un tiers qui, selon nous, n’était pas suffisamment spécialisé pour le commercialiser sur un marché plus vaste et ainsi accroître la confiance dans les diamants.

Quel est le lien entre l’IIDGR et Forevermark ?

JK : La marque Forevermark et l’IIDGR travaillent ensemble mais proposent des produits et des services différents. L’IIDGR effectue tout le travail de sélection et l’activité diamantaire pour Forevermark, en s’assurant de choisir les diamants qui répondent aux critères de la marque.

Nous certifions des diamants pour Forevermark depuis 2004, à l’époque où la marque a été testée en Chine et à Hong Kong. Nous avons également commencé à certifier et à graver des diamants pour De Beers Diamond Jewelers aux alentours de 2010. Alors que nous soutenions les programmes de marque de la De Beers, les gens ont commencé à nous demander la certification générique des diamants. Il a semblé logique d’ajouter cela à ce que nous faisions car nous disposions déjà des systèmes, du personnel et d’un équipement exclusif.

Quelle est la valeur ajoutée qu’apporte l’IIDGR dans l’environnement de la certification ?

JK : Nous assurons une amélioration considérable de la précision et de la cohérence grâce à la technologie que nous utilisons.

Récemment, on a beaucoup parlé du manque de cohérence dans certains laboratoires, ce qui complique l’achat de diamants certifiés dans d’autres pays. Notre technologie garantit la cohérence de la certification dans tous nos laboratoires au Royaume-Uni, à Anvers et à Surat.

Expliquez-nous votre utilisation de la technologie dans le processus de certification.

JK : Nous appliquons actuellement quatre à cinq étapes afin de déterminer la couleur et la pureté d’un diamant, les aspects les plus difficiles de la certification. Nous faisons appel à la technologie pour nous prononcer sur la couleur et la pureté lors d’une première étape, puis nos certificateurs viennent confirmer cette décision.

Nous avons analysé et comparé la certification de notre équipement à celle de dizaines de milliers de résultats du Gemological Institute of America (GIA). Nous sommes désormais si précis en matière de couleur que nous utiliserons bientôt la machine de certification des couleurs associée à un certificateur final pour valider la décision, réduisant ainsi la procédure à deux étapes seulement.

Il nous faudra quelques années pour arriver à ce résultat en matière de pureté, mais entre-temps, nous utiliserons la technologie pour aider les certificateurs autant que possible. La technologie de certification de la pureté permet d’obtenir une carte, autrement dit une aide pour le certificateur, qui offre une image de toutes les inclusions d’un diamant. Le certificateur peut l’utiliser pour analyser une pierre au lieu de se contenter d’un microscope et de ses yeux.

L’équipement peut aussi mettre au jour des aspects douteux. Ainsi, si la machine d’analyse de la couleur ou de la pureté détecte une anomalie, elle en avertira le certificateur afin qu’il y prête davantage attention.

Les autres laboratoires ont-il la possibilité d’acheter l’équipement ?

JK : Nous avons fait le choix délibéré de ne pas vendre notre équipement car nous craignons qu’il soit mal employé, lésant la confiance des clients. Cet équipement doit être géré, utilisé et étalonné chaque jour.

Quels sont les normes de certification et les termes utilisés par l’IIDGR ?

JK : Nous utilisons la même norme de certification que le GIA. Nous avons analysé leurs résultats et nous les avons utilisés pour développer notre propre ensemble étalon. Nous n’insistons pas sur l’ensemble étalon car tous les algorithmes de notre équipement sont, en un sens, leur propre ensemble étalon.

Nous étions absolument certains d’avoir raison en utilisant les normes du GIA. Nous sommes décidés à éviter les problèmes qui sont apparus l’année dernière ou il y a deux ans dans les laboratoires qui utilisaient les termes du GIA mais pas leurs normes de certification. Cela est essentiel. Vous ne pouvez pas utiliser des termes, puis fournir une marchandise de moins bonne qualité que ce que vous annoncez.

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Comment s’est passé le lancement ?

JK : Nous n’en sommes encore qu’au début. Nous faisons la publicité de cette activité lors des salons commerciaux. Jusqu’à présent, les réactions ont été très positives. Nous commençons également à recruter des détaillants qui souhaitent utiliser nos rapports, nous les incitons à parler aux diamantaires et à commander des marchandises par leur intermédiaire.

L’IIDGR propose une approche technologique très contrôlée de la certification, dans laquelle l’implication humaine est très forte. Grâce à cela, les certificateurs ne peuvent pas faire remonter les marchandises jusqu’aux clients, ce qui risquerait de biaiser leurs décisions.

Il faut du temps et nous voulons être certains que nous ne nous mettrons pas en difficulté. L’essentiel pour nous est de tenir notre promesse et d’offrir un service qui réponde aux besoins de l’industrie. Nous ne cherchons pas la croissance à tout prix. Nous voulons construire une base solide et poursuivre notre développement sur plusieurs années.

Quels sont les marchés que vous ciblez ?

JK : Notre axe principal est l’Extrême-Orient, en particulier la Chine, le Japon et Taiwan. Nous nous intéressons également à l’Europe, principalement le Royaume-Uni, l’Italie et la Suisse et nous commençons également à cibler le Canada. Nous pouvons travailler aux États-Unis mais nous ne sommes pas pressés car nous visons actuellement le reste du monde.

Un particulier peut-il faire certifier un diamant ?

JK : Nous n’avons pas encore de tels projets pour l’instant. Nous nous concentrons sur le marché.

Comment un professionnel qui se trouve sur d’autres sites, comme Israël, Mumbai ou l’Afrique australe, peut-il faire certifier une pierre ?

JK : Il peut nous envoyer directement ses diamants. Les clients peuvent s’inscrire sur notre site Internet, nous répondons rapidement aux demandes. Nous mettons également en place des vitrines partout dans le monde et nous sommes en train de conclure des négociations avec plusieurs partenaires potentiels, qui souhaitent ardemment travailler avec nous.

Quel niveau d’activité espérez-vous pour cette année ?

JK : Nous pouvons traiter près d’un demi-million de diamants cette année. Nous sommes également en mesure d’augmenter considérablement cette capacité en investissant massivement dans la technologie. En termes de place, nous avons la possibilité de doubler notre équipement très rapidement.

Nous ne nous attendons pas à obtenir de gros volumes de marchandises d’un jour à l’autre. Nous avons commencé avec Forevermark exactement de la même façon. Il faut du temps pour faire connaître une marque et obtenir le soutien des acteurs du marché, puis des consommateurs, afin qu’ils croient en ce que vous faites.

Quels sont vos délais d’exécution?

JK : Ils sont d’environ une semaine. Notre objectif est de ne pas dépasser 15 jours lorsque nous serons à pleine capacité.

Concernant vos machines de détection, constatez-vous une augmentation des mélanges de synthétiques non déclarés ?

JK : Il n’y a pas eu récemment de grosses quantités de synthétiques non déclarés mélangés à des diamants naturels mais il y a des problèmes. Nous trouvons effectivement des imitations dans le mêlé et il y a également eu plusieurs rapports, dans des pays comme la Chine, annonçant la découverte de diamants améliorés sous haute pression haute température (HPHT) mélangés à des diamants naturels. Il est certain que ces problèmes existent et la détection doit désormais faire partie d’une pratique commerciale normale dans l’industrie.

Nos machines détectent tout, y compris les synthétiques et les pierres améliorées, ce qui est important car certains, sur le marché, prétendent que leurs machines peuvent tout découvrir alors que ce n’est pas le cas. Les gens se plaignent parfois du prix de nos machines mais c’est comme tout dans la vie, il faut mettre le prix pour obtenir quelque chose de bien.

Que pensez-vous du marché du mêlé ?

JK : Je pense que le mêlé a un bel avenir et nous verrons, dans un an ou deux, davantage de détaillants, de fabricants de bijoux et de négociants de diamants acheter des paquets scellés de mêlé afin d’être certains de leurs achats. Il faut adopter une approche multidimensionnelle du risque de contamination des synthétiques non déclarés dans le mêlé.
Selon nous, les gens vont avoir besoin de leur propre équipement car ils doivent souvent acheter du mêlé pour satisfaire une commande. Il vaudrait mieux qu’ils aient leur propre équipement pour tester le mêlé qu’ils achètent.

Travaillez-vous sur une mise à niveau de vos machines de détection ?

JK : Les mises à niveau sur lesquelles nous travaillons visent principalement la vitesse car nous avons déjà la précision requise. Nous cherchons également à développer un service qui permettrait de tester les bijoux. Le développement de ce genre d’équipement est très difficile mais nous pensons qu’il sera prêt l’année prochaine.

Quelle a été la croissance des revenus de l’IIDGR en 2015 ?

JK : Notre croissance est très bonne en termes de pourcentage mais notre activité est évidemment très réduite par rapport à l’exploitation minière de la De Beers.

Notre but n’est pas de nous concentrer sur les revenus, mais de nous assurer que l’industrie joue son rôle pour maintenir une confiance optimale dans les diamants. Tout ce que nous faisons est toujours lié à la confiance, qui est finalement la base de notre capacité à vendre du brut. Cette idée est le point central de notre modèle d’activité, qu’il s’agisse de notre équipement de détection ou des services de certification.

Source Rapaport