L’intérêt des marchandises en consignation

Rapaport

Dans notre mode de vie dominé par la sécurité, où une simple transaction requiert souvent un nom d’utilisateur, un mot de passe, une reconnaissance faciale ou une autre forme de technologie, il est presque rafraîchissant de voir que les marchandises en consignation – une pratique quasiment aussi ancienne que l’industrie des bijoux elle-même – se porte bien

La consignation est un accord simple, généralement conclu entre un grossiste et un détaillant. Les formalités administratives sont réduites au minimum ; cet accord repose essentiellement sur le temps et la confiance. Dans un secteur aussi profondément ancré dans les traditions que celui des bijoux, les personnes travaillent souvent dans leurs entreprises ou avec leurs familles respectives depuis des générations. La consignation et une poignée de mains suffisent en général pour que d’énormes quantités de pierres précieuses et de bijoux passent d’une personne à l’autre.

Dans les consignations les plus simples, le fournisseur confie des produits à un détaillant, qui ne les paie que lorsqu’ils sont vendus. Cette transaction, bien souvent conclue à long terme et sans intérêt, est à peu près aussi sophistiquée que la poignée de mains dont nous parlions mais tout aussi contraignante.

Rester flexible

Bien que la consignation ne soit pas sans inconvénient (voir plus loin), elle possède néanmoins certains avantages, en particulier pour le détaillant. Par exemple, la consignation de marchandises peut améliorer la gestion des liquidités d’une entreprise. Elle permet aux détaillants d’élargir leur stock sans le payer jusqu’à ce qu’il soit vendu, et donc de conserver leur capital. Dans les autres configurations, le détaillant engage ce capital pour acheter son stock, souvent sans garantie que les produits se vendront dans un délai raisonnable. Or, comme la consignation est généralement assortie de conditions généreuses, pouvoir offrir une gamme de produits élargie sans devoir débourser plus d’argent devient attrayant. Par ailleurs, les marchandises en consignation ont en général une valeur supérieure au montant que le détaillant débourse pour acheter son stock.

Il faut également tenir compte du fait que les prix des pierres et métaux précieux sont dynamiques et fluctuent en fonction des conditions du marché et de l’évolution des préférences des consommateurs. Un produit très à la mode au printemps pourrait ne plus l’être en automne. Dans ce cas, le détaillant sera amené à le vendre à prix réduit ou à le restituer au fournisseur. Si les prix baissent sensiblement, les détaillants avec des marchandises en consignation peuvent en renégocier le prix avant de les acheter. À l’inverse, si les prix augmentent, les marchandises en consignation négociées à des tarifs inférieurs peuvent accroître la marge bénéficiaire du détaillant.

Du point de vue financier

Un autre avantage de la consignation réside dans le fait qu’elle n’affecte pas le passif fiscal du détaillant et améliore son profil de solvabilité. Généralement, il n’est pas nécessaire de déclarer les marchandises en consignation dans les bilans financiers et il n’y a pas de limite à la quantité de produits que le détaillant peut accepter. Comme ces marchandises n’appartiennent pas au consignataire, c’est-à-dire au détaillant, elles ne sont pas comptabilisées comme achats et ne constituent donc pas un passif des comptes créditeurs.

Cela vaut également au moment de demander un prêt ou un crédit. Les prêteurs, formés à calculer les risques, ont tendance à désapprouver les entreprises affichant trop de créances et qui immobilisent trop de fonds de roulement dans leur stock. Or, les marchandises en consignation ne sont pas retenues pour les demandes de crédit, puisqu’elles appartiennent au fournisseur jusqu’à ce qu’elles soient vendues.

La consignation permet également aux détaillants d’éviter les intérêts d’un crédit bancaire. Les liquidités restent ainsi disponibles pour d’autres besoins plus urgents, tels que le financement d’un agrandissement ou le paiement des salaires. Les banques facturent des intérêts sur tous les montants dus et exigent en général une garantie personnelle et une vérification de solvabilité afin de déterminer si le candidat présente un risque raisonnable. Cette démarche prend du temps et, bien souvent, le résultat final ne répond pas aux besoins du détaillant. En revanche, les marchandises en consignation sont exemptes d’intérêts et ne nécessitent pas de garantie personnelle. Les parties peuvent conclure rapidement des accords fondés sur la confiance, la réputation et la volonté mutuelle de bâtir une relation commerciale prospère.

Robert Hoberman, expert-comptable agréé, est directeur associé de Hoberman & Lesser, un cabinet de comptabilité et de conseil à New York. hobermanlesser.com

Comment réduire les risques

La consignation implique une prise de risque considérable pour le grossiste ou le fabricant. Elle peut commencer par un accord à court terme que les parties ont la possibilité de prolonger au besoin, mais le suivi des marchandises et leur règlement une fois qu’elles sont vendues peut être difficile et prendre du temps. Il est donc essentiel de tenir des registres précis.


Plus la consignation d’une marchandise dure, plus le risque est grand. Les aléas comme les vols, les pertes ou les dommages causés par un incendie ou une catastrophe naturelle deviennent de plus en plus probables. De même, si un détaillant en possession de marchandises consignées fait faillite, il peut être difficile d’obtenir une restitution. Dans ce genre de situations, le recours du fournisseur peut être limité, puisqu’en général, la consignation n’offre que peu ou pas de protection. Les demandes de remboursement d’autres créanciers, notamment les services gouvernementaux et les banques, peuvent avoir la priorité. Les marchandises en consignation peuvent même être utilisées pour les rembourser.


Les problèmes de communication constituent une autre source de difficultés potentielles. Des accords simples en apparence peuvent se compliquer et des malentendus peuvent affecter ou ruiner des relations quand la situation tourne mal. Malgré les règles de comportement communément acceptées dans l’industrie des bijoux, les conditions peuvent varier. Le fait de mettre par écrit les conditions générales et les descriptions des articles et de s’assurer que les deux parties sont conscientes de leurs responsabilités permet d’éviter certains problèmes.

Des experts, comme les cabinets comptables indépendants et les avocats spécialisés dans le secteur de la bijouterie, peuvent aider à rédiger le type de consignation qui correspond à vos besoins commerciaux. À l’instar de nombreux accords commerciaux, une communication claire ainsi qu’une compréhension mutuelle des obligations de chaque partie dès le début peut aider à garantir une expérience positive sur le long terme. 

Source Rapaport


Photo © Cytonn Photography on Unsplash