L’intelligence artificielle oblige toutes les industries à se réadapter

Albert Robinson

Si, rétrospectivement, chaque jour ou presque de l’année 2018 semblait apporter son lot d’articles sur le développement de l’intelligence artificielle (IA) et ses effets sur l’emploi et l’économie, il est raisonnable de penser qu’il y en aura d’autres cette année.[:] Les investissements dans le domaine sont énormes. La Chine serait en tête, injectant chaque année jusqu’à 10 milliards de dollars dans le secteur.

Inutile de dire que cela a donné lieu à de nombreux articles apocalyptiques, laissant présager que l’ère des emplois traditionnels était révolue. L’IA devrait, dans les années à venir, automatiser des millions, des dizaines de millions, voire des centaines de millions d’emplois. Certains y voient comme corollaire naturel logique un chômage de masse.

Dans les 10 ans à venir, l’IA devrait permettre de rédiger une dissertation de niveau lycée et de conduire des véhicules mieux que les êtres humains. Certains analystes considèrent qu’il existe 50 % de chances que l’IA fasse mieux dans toutes les tâches humaines dans les 45 ans à venir et automatise tous les emplois au cours du siècle prochain. Rappelons toutefois qu’au milieu des années 70, les bureaux zéro papier étaient prévus pour les années 90. Regardez autour de vous dans votre bureau et jugez par vous-mêmes.

Le développement de solutions d’IA ces dernières années s’est révélé extraordinaire. Il y a deux ans, le laboratoire DeepMind de Google a produit une machine capable de battre un joueur professionnel au jeu de Go, un jeu de plateau antique. Nommée AlphaGo, elle a battu le champion européen Fan Hui de cinq jeux à zéro. AlphaGo a ensuite battu Lee Sedol, le meilleur joueur de Go de la dernière décennie. Les plus grands experts de l’IA avaient pensé qu’il faudrait 10 ans de plus avant qu’une machine soit capable de résoudre ce jeu, incroyablement difficile. Le Go aurait davantage de positions de plateau possibles qu’il n’existe d’atomes dans l’univers. Ainsi, les meilleurs joueurs gagneraient davantage grâce à leur intuition qu’à de simples calculs. La machine, dénuée de tout sentiment, a réalisé des mouvements qui ont laissé sans voix les êtres humains – chercheurs et joueurs – mais les a également amenés à penser que la voie vers la « super-intelligence » n’était après tout pas si éloignée.

Ce sujet fascinant – et son effet possible sur l’industrie diamantaire internationale – m’a une fois de plus interpellé au cours de la semaine du 21 janvier après l’annonce par la société technologique israélienne Sarine Technologies, à l’occasion de l’International Diamond Week en Israël (IDWI) du 28 au 30 janvier, de l’inauguration de son nouveau laboratoire de certification totalement automatisé.

Le lancement de la seule structure de ce type basée sur l’intelligence artificielle est le résultat d’un programme pilote du laboratoire, ouvert en février 2018.

Le laboratoire Sarine propose des rapports de certification automatisés basés sur l’apprentissage machine et contrôlés par des gemmologues experts. Il produit des résultats de certification objectifs et cohérents, a indiqué la société. Elle a également affirmé que son laboratoire proposait des certifications de performances de lumière scientifiquement fondées et qui mesurent la brillance, l’éclat, les feux et la symétrie lumineuse. Il en ressort une évaluation objective de la beauté du diamant, un atout allant au-delà des 4C.

L’histoire racontée par l’industrie diamantaire depuis des centaines d’années met en scène des artisans expérimentés assis, examinant des diamants de très près. Seul l’œil humain est en mesure de voir la façon dont un diamant peut être taillé et poli et d’évaluer sa valeur.

Mais l’arrivée de l’IA va probablement changer la donne dans cette industrie, comme elle l’a fait dans d’autres secteurs. S’il est possible de développer une voiture autonome pour aller vous chercher, vous amener à destination, puis passer au client suivant, une machine capable d’inspecter un diamant en fonction de certains paramètres ne semble pas exagérée.

Sarine affirme que les laboratoires feront partie d’un réseau de laboratoires de gemmologie avancés et automatisés. Si l’on en croit ce que Sarine décrit comme une percée en matière de technologies de l’intelligence artificielle, le laboratoire inclura une certification automatisée, précise, cohérente et objective de la pureté de la couleur d’un diamant taillé.

« Je crois que dans cinq à dix ans, les rapports automatisés sur la couleur et la pureté seront communs, a expliqué David Block, PDG du groupe Sarine. La technologie peut fournir des services de certification homogènes et répétables. Actuellement, un même diamant peut recevoir des rapports avec deux à trois grades de différence, selon les laboratoires. Bien évidemment, cela n’arrive pas avec notre technologie que nous vérifions et améliorons sans cesse. »

Cela signifie-t-il que certains emplois vont disparaître à jamais ? Probablement. Une fois de plus, de nombreux postes ont été supprimés ces dernières décennies en raison de la mondialisation et non en conséquence de l’IA ou de la technologie. Les gens ont dû apprendre à s’adapter. L’IA implique-t-elle que des gens vont être sacrifiés ? Rappelons que de nouveaux emplois seront créés, apportant d’autres opportunités de travail. J’ai le sentiment que de nombreux emplois, auparavant assez bien payés, qui assuraient à des millions de personnes de la classe moyenne une place solide dans la vie, vont disparaître, comme cela est déjà souvent arrivé. Le marché décide de tout, en positif et en négatif, et le marché diamantaire, comme tous les autres, va devoir s’adapter à la nouvelle réalité.

Source Idexonline


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