Les femmes n’attendent plus pour acheter leurs propres bijoux

Abraham Dayan

Des États-Unis à l’Asie en passant par l’Europe, de plus en plus de femmes choisissent de ne plus attendre que leurs compagnons ou époux leur offrent des bijoux. Elles sont désormais plus nombreuses à se les offrir elles-mêmes.[:]

Aujourd’hui, les femmes sont plus indépendantes que jamais au plan financier et préfèrent s’offrir ce qui leur plaît plutôt que de s’en remettre à leurs partenaires ou époux. Elles veulent également des bijoux adaptés à leurs tenues professionnelles et s’offrent ces plaisirs comme preuve tangible de leur succès dans le monde du travail.

Ce segment du marché en pleine croissance, tout comme les types de diamants présents dans les articles choisis par ces femmes, peuvent offrir de précieux renseignements sur l’évolution des tendances et les types de marchandises appréciées des consommatrices, informations utiles aux fabricants et détaillants de diamants et de bijoux. L’industrie tire-t-elle profit de cette formidable opportunité marketing ?

La hausse des achats de bijoux par les femmes pour elles-mêmes coïncide avec des nombres record de femmes financièrement indépendantes, qui disposent de plus de liquidités disponibles que jamais auparavant. Elles sont fières de leur indépendance et en veulent des preuves concrètes, pour leur propre satisfaction.

« Les femmes ciblent mieux les achats qui les concernent que les hommes, a expliqué un créateur de bijoux. Vous n’envoyez pas votre petit ami ou votre mari vous acheter une robe car vous ne savez jamais avec quoi il va revenir. Cela vaut aussi pour les bijoux. »

Cette tendance touche aussi le marché des bagues de fiançailles. En effet, certains joailliers expliquent que les femmes ont pris un tel contrôle sur leurs achats de bijoux que les hommes sont aujourd’hui moins nombreux à acheter des bagues de fiançailles pour leurs promises. « Avant, les femmes se contentaient de recevoir ce qu’on leur offrait. L’homme venait acheter seul et elles acceptaient le présent. Aujourd’hui, la tendance est inversée. La femme vient seule. Elle sait déjà ce qu’elle veut », a expliqué un joaillier.

En Amérique du Nord, en Europe et dans le monde occidental en général, la structure traditionnelle des ménages a fondamentalement changé en deux générations. Actuellement, dans la plupart des familles, la mère et le père travaillent. Moins de 10 % des familles américaines et européennes vivent avec un seul revenu. En outre, aux États-Unis, des études montrent que plus de 90 % des décisions d’achat sont prises par des femmes qui réalisent plus des trois-quarts des achats elles-mêmes. Les chiffres sont similaires en Europe et assez proches sur les grands marchés asiatiques.

Les femmes décident de plus en plus de la répartition des dépenses du ménage. De ce fait, elles ont aussi moins de scrupules à consacrer une partie de leurs salaires à des produits qu’elles souhaitent posséder.

Women Empowerment

Une étude du Jewelry Consumer Opinion Council (JCOC) menée aux États-Unis a montré que 23 % des femmes qui achètent pour elles-mêmes prévoyaient de s’offrir des bijoux contenant des pierres de couleur ou des perles de culture au moins une fois par an. Par ailleurs, de nombreuses femmes étaient susceptibles d’acheter des bijoux pour suivre la mode. Elles ne voulaient pas attendre pour recevoir un article de luxe, en particulier lorsqu’elles savaient exactement ce qu’elles voulaient.

Le rapport du JCOC a également conclu que la moitié des femmes qui achètent pour elles-mêmes acquièrent un bijou simplement par goût. Les détaillants de bijoux locaux réagissent au nouveau poids des femmes dans les décisions d’achat de luxe en leur proposant des systèmes de listes d’envies, qui leur permettent de préciser leurs préférences, pour des fiançailles par exemple.

« C’est un peu comme si une fiancée s’inscrivait pour un mariage, a expliqué un joaillier. Bien souvent, la femme vient en premier, nous mettons ce qu’elle aime sur papier. Le fiancé saura alors exactement ce qu’il doit demander. »

Certains observateurs de l’industrie font un lien entre ces achats personnels des femmes et la De Beers et sa campagne publicitaire pour la bague de la main droite : « Left hand is we. Right hand is me. Women of the world raise your right hand 1. » C’est à ce moment-là que les femmes ont commencé à affirmer leur capacité et leur pouvoir à s’acheter elles-mêmes leurs bijoux.

D’autres campagnes ont suivi, comme celles de la bague à trois pierres et de la bague de la main droite ; cette dernière en particulier ciblait uniquement les femmes et pourrait correspondre au moment charnière où les achats personnels des femmes se sont envolés.

Le fait que l’écart de revenus entre hommes et femmes se resserre, en particulier chez les plus jeunes, est clairement l’un des principaux facteurs du développement des achats personnels des femmes. C’est une bonne chose pour l’industrie de la joaillerie, qui a besoin d’attirer les jeunes femmes, plus susceptibles d’acheter pour elles-mêmes. Si l’industrie savait fidéliser ces femmes tout au long de leur vie, afin qu’elles reviennent acheter des bijoux, ce segment pourrait devenir très lucratif.

La première campagne destinée à promouvoir les achats personnels de bijoux en diamants par les femmes remonte au début des années 80. Elle ciblait le marché japonais et avait été créée par J. Walter Thompson pour le compte de la De Beers.

Le nombre relativement important de femmes célibataires qui travaillaient au Japon à l’époque a incité ce publicitaire à lancer la campagne « Diamond for Working Women ».

Pourquoi les femmes s’achètent-elles des bijoux pour elles-mêmes ? La réponse, semble-t-il, peut être aussi complexe et aussi diverse que les femmes elles-mêmes. Outre vouloir marquer un événement important de leur vie, comme un anniversaire spécial, un succès professionnel ou une occasion particulière, certaines voudront simplement acquérir un article qui leur plaît ou compléter leur garde-robe.

L’étude a également montré que l’achat d’un bijou se fait souvent en souvenir d’un lieu ayant une signification particulière, par exemple pendant les vacances. Le bijou peut aussi symboliser un lien avec une personne à laquelle l’acheteur tient, comme une mère ou une fille, ou deux meilleures amies qui s’achètent des bijoux coordonnés.

Plus souvent, l’achat vient marquer des événements comme une promotion au travail, un anniversaire important ou une date symbolique. Et il n’y a pas que les anniversaires les plus prévisibles, comme les anniversaires de mariage, qui sont concernés. L’achat permet également de fêter des événements comme une année de survie à un cancer du sein.

En outre, le bijou peut être une affirmation forte chez les femmes qui achètent pour elles-mêmes. Sa permanence même – le fait qu’il soit fabriqué dans des métaux comme le platine, l’or ou l’argent et serti des pierres les plus dures qui soient – joue sur la volonté d’achat. Il peut être porté souvent, avec plusieurs tenues différentes et à de nombreuses occasions, sans compter qu’il peut être légué à la génération suivante.

D’après une étude du JCOC, les femmes achètent des bijoux pour elles-mêmes, mais elles le font souvent ailleurs que dans les joailleries traditionnelles. Les chaînes viennent en première position, suivies des bijouteries indépendantes, d’après l’étude.

Toutefois, 60 % des femmes achètent des bijoux ailleurs que dans les joailleries traditionnelles et le pourcentage de femmes qui achètent des bijoux en ligne, dans les grands magasins et chez les détaillants de masse augmente. Plus des deux tiers des 2 476 femmes interrogées ont indiqué qu’elles s’étaient acheté des bijoux pour elles-mêmes par le passé et 16 % prévoyaient de le faire dans les six prochains mois. Environ 78 % ont affirmé qu’elles achetaient des bijoux dès qu’elles voyaient quelque chose qui leur plaisait et plus de la moitié a déclaré en avoir acheté pendant qu’elles faisaient des achats pour d’autres ou pour fêter des anniversaires ou des réussites.

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L’industrie de la joaillerie de détail fait-elle suffisamment d’efforts pour attirer ces femmes, qui représentent désormais une puissance commerciale considérable sur le marché ? L’enquête du JCOC conclut : « Ce segment démographique des consommatrices de bijoux est largement sous-exploité et ignoré par l’industrie de la joaillerie dans son ensemble. »

L’étude du JCOC a montré que deux tiers des femmes qui achetaient pour elles-mêmes aux États-Unis, au cours d’une année ordinaire, s’achèteraient de nouvelles chaussures entre deux et cinq fois, tandis que 12 % supplémentaires ont déclaré qu’elles s’achèteraient de nouvelles chaussures plus de cinq fois par an. De même, pour les achats de vêtements au cours d’une année ordinaire, 45 % des femmes interrogées ont affirmé qu’elles s’achèteraient une nouvelle robe ou une nouvelle tenue entre deux et cinq fois par an et 29 % ont répondu qu’elles en achèteraient plus de cinq fois par an.

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« Ce segment démographique des consommatrices de bijoux est largement sous-exploité et ignoré par l’industrie de la joaillerie dans son ensemble. . »

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Toutefois, en ce qui concerne les achats de bijoux au cours d’une année ordinaire, 23 % seulement ont déclaré qu’elles n’en réaliseraient qu’un, tandis que 19 % ont répondu « Je ne suis pas sûre » et 23 % ont répondu « Aucun ».

Parmi ces femmes, 57 % ont affirmé qu’elles trouvaient « rarement » suffisamment de choix, tandis que 61 % ont affirmé qu’elles trouvaient « rarement » des prix qui correspondaient à leur budget. Les trois facteurs les plus importants pour ces consommatrices lors de l’achat de ce produit étaient de savoir que les pierres des bijoux étaient authentiques et non synthétiques, de pouvoir faire confiance au vendeur et de pouvoir retourner ou échanger facilement l’article.

Source Rough & Polished


[1] La main gauche, c’est nous. La main droite, c’est moi. Femmes du monde, levez votre main droite.