La De Beers, vache à lait d’Anglo American

Mathew Nyaungwa

Lorsque le gouvernement du Botswana a renoncé à son droit de préemption sur 10 % supplémentaires de la De Beers il y a deux ans, il a ouvert un boulevard à Anglo American, qui a ainsi pu faire passer sa participation dans le groupe diamantaire à 85 %.[:]

Anglo s’est ainsi porté acquéreur de 40 % supplémentaires de la De Beers (précédemment détenus par la famille Oppenheimer), pour un montant total de 5,2 milliards de dollars en numéraire.

Lorsque Anglo American préparait la transaction, un responsable de la De Beers a fait remarquer que le groupe minier diversifié appuierait ses projets de croissance sur les diamants.

Son portefeuille minier comporte des matières premières en vrac : minerai de fer et manganèse, charbon métallurgique et charbon thermique, des métaux et minéraux de base (cuivre, nickel, niobium et phosphates), ainsi que des métaux et minéraux précieux. Dans cette dernière catégorie, le groupe est leader mondial, en termes de valeur, pour le platine et les diamants.

Miningmx a rapporté les propos de David Prager, responsable mondial des affaires d’entreprise pour la De Beers. Celui-ci aurait affirmé que le minier en diamants constituait un atout considérable pour Anglo.

« Il est intéressant de noter que ce n’est qu’après avoir été intégré à Anglo, que les 2 milliards de dollars budgétisés pour l’extension souterraine de Venetia (dans la province de Limpopo, en Afrique du Sud) ont été accordés à la De Beers », a-t-il affirmé.

« Indubitablement, Anglo a démontré sa foi dans les diamants et sa volonté d’investir. »

Philippe Mellier, le président-directeur général de la De Beers, a également déclaré à l’époque que l’importance croissante des diamants pour Anglo était une bonne nouvelle, ajoutant que la perspective d’une attention plus soutenue ne le dérangeait aucunement.

« Anglo respecte la De Beers. C’est là toute la différence », a-t-il déclaré.

La De Beers a déjà prouvé, en peu de temps, qu’elle était une vache à lait pour le groupe minier diversifié. Récemment, certains médias l’ont qualifiée d’« élément star » d’Anglo pour le premier semestre.

Elle a contribué pour 469 millions de dollars aux bénéfices sous-jacents du conglomérat minier diversifié, lesquels s’élèvent à 1,284 milliard de dollars.

Le deuxième contributeur aux bénéfices d’Anglo, pour un montant de 443 millions de dollars, a été l’unité de minerai de fer et de manganèse.

«… Nous sommes ravis de nos performances, mais nous n’allons pas nous reposer sur nos lauriers », a expliqué Lynette Gould, responsable de la De Beers pour les relations avec les médias, à Rough&Polished.

« Notre objectif est d’assurer une croissance des bénéfices sur l’année, car nous nous approchons de l’objectif de RCE (rendement des capitaux engagés) de 15 % d’ici 2016, établi par Marc Cutifani pour toutes les unités d’activité d’Anglo American. »

Anglo a pour objectif de stimuler le RCE – une mesure de la valeur qu’une société retire de ses actifs –, qui était de 11 % l’année dernière.

Le chiffre est toutefois retombé à 10 % cette année, en raison d’une baisse des prix des matières premières et d’une longue grève minière qui a grevé la production de platine d’Anglo en Afrique du Sud.

Outre sa contribution à Anglo, la De Beers a enregistré un pic de 34 % de ses bénéfices d’exploitation sous-jacents, à 765 millions de dollars au premier semestre, grâce à de bonnes performances de Debswana et aux opérations sud-africaines de la De Beers, qui ont généré une hausse de 12 % de la production de diamants, avec 16 millions de carats.

Néanmoins, autant la De Beers a été une vache à lait pour Anglo au premier semestre, autant le scénario pourrait évoluer au second semestre, traditionnellement plus faible en matière d’échanges pour la De Beers.

« Certes, le premier semestre a été solide, mais nos performances sont généralement meilleures à cette période de l’année », a affirmé Lynette Gould.

« Il faut garder à l’esprit les conséquences de la nature saisonnière de la consommation de taillé. Cela implique que les performances annuelles de la De Beers sont généralement concentrées au premier semestre. En effet, il s’agit de la période de réapprovisionnement normal pour les diamantaires du secteur intermédiaire, après la principale saison de vente. »

Anglo connaît l’importance qu’avait la De Beers pour son activité et a dû réfuter des rapports, en décembre dernier, selon lesquels la société envisageait de vendre ou de scinder ses actifs en diamants et en platine d’ici 2016.

Le Wall Street Journal avait rapporté les propos d’analystes restés anonymes, qui avaient déclaré à l’époque qu’Anglo pourrait retirer davantage pour ses actionnaires de ses participations majoritaires dans la De Beers et Anglo American Platinum, grâce à une scission ou une vente de ses actions dans les sociétés.

« Cela ne fait pas partie de nos plans à l’horizon d’un ou deux ans [de nous séparer des activités diamant ou platine] », aurait affirmé Marc Cutifani, président-directeur général de la société, cité par le Wall Street Journal.

« Si, alors que nous les amenons à leur plein potentiel, le marché ne nous accorde pas sa confiance pour ces activités, nous pourrons alors réfléchir à d’autres alternatives stratégiques. »

Il a affirmé qu’il existait tant d’opportunités d’amener ces actifs à leur plein potentiel qu’il serait malvenu de s’en séparer.

Il faut remarquer que beaucoup de choses ont changé depuis lors pour les activités platine du groupe.

Après une grève de cinq mois dans certaines structures du platine d’Anglo American en Afrique du Sud, la division platine a enregistré une perte d’exploitation sous-jacente de 1 million de dollars pour le semestre clos en juin, contre un bénéfice d’exploitation sous-jacent de 187 millions de dollars au premier semestre 2013.

Anglo prévoyait des conséquences sur sa production au second semestre, car la société a poursuivi son processus de montée en puissance. La production devrait reprendre un rythme régulier au quatrième trimestre.

« Dans la section platine, nous avons déjà évoqué des projets pour recentrer le portefeuille, grâce à la cession programmée des mines de Rustenburg et d’Union », a expliqué Marc Cutifani.

« Nous prévoyons de nous dessaisir de plusieurs autres actifs au moment opportun et de redéployer ce capital pour soutenir notre parcours vers une hausse des bénéfices. »

Ceci fait donc de l’unité du diamant, mais aussi de celle du minerai de fer et du manganèse, des pierres angulaires sur lesquelles Anglo continuerait à appuyer sa rentabilité, du moins pour le moment.

Source Rough & Polished