Interview avec Andrew Bone, directeur exécutif du RJC

Rob Bates

L’heure est-elle enfin venue pour une chaîne de responsabilités des diamants ?

Andrew Bone, le directeur exécutif du Responsible Jewellery Council (RJC), a pris le temps de s’entretenir avec moi après sa présentation lors de la réunion annuelle du World Diamond Council, plus tôt ce mois-ci. [:]Voici les points forts de notre conversation.

JCK : Il y a quelque temps, on parlait beaucoup du fait que le RJC développe une chaîne de responsabilités. Cela ne s’est jamais produit. Pensez-vous que cela se concrétise maintenant ?

Andrew Bone : Pourquoi pas ? [Le projet] n’a pas été abandonné ; il a simplement été mis en sommeil. Je pense qu’il existe un mouvement en ce sens. Lorsque nous avons engagé la discussion sur la chaîne de responsabilités il y a quelques années, ce n’est pas que nous étions catégoriquement contre. C’est plutôt que nous n’étions pas certains du modèle proposé, nous n’étions pas certains du calendrier. Je pense qu’il va bientôt y avoir une opportunité de revoir cela et de relier tous ces éléments ensemble. Il existe des initiatives séparées [partout dans l’industrie] qui tendent essentiellement vers ce que nous voulons obtenir avec la chaîne de responsabilités.

Il y a quelques années, beaucoup étaient réticents face à ce concept. Pensez-vous que l’industrie soit davantage prête aujourd’hui ?

Oui. Je pense que c’est une question de timing. Il y a quelques années, les gens n’étaient pas prêts. Ils avaient des doutes : avons-nous vraiment besoin de ce genre de choses ? Comme je l’ai dit dans ma présentation, les diamants du conflit ne sont plus le plus gros risque pour l’industrie. C’est toujours un risque mais il y en a d’autres dont nous devons nous occuper. Nous devons nous occuper de la culture du consommateur. Cela est revenu plusieurs fois [lors de la réunion] à propos de la génération Y. Cette génération va davantage passer l’industrie au crible. Si, tous ensemble, nous ne faisons pas passer notre message et nous ne nous engageons pas auprès de cette génération, ils iront chercher leurs informations sur Google. Et nous savons où cela peut mener.

Lorsque la chaîne de responsabilités a été proposée, on a parlé d’une limite de taille. Cela est-il possible ?

Il y a là matière à discussion. Les choses changent, la technologie évolue. Qui sait ce que nous aurons à notre disposition à l’avenir ? C’est un détail. Ce que nous devons faire d’abord, c’est vendre le concept et amener les gens à l’adopter. Lorsque nous aurons surmonté cet obstacle spécifique, nous pourrons avancer. Je ne pense pas que quiconque doive être forcé de participer. Il faut un consensus dans toute l’industrie. Je pense qu’il y a une difficulté à ce niveau mais je pense aussi qu’il faut garder à l’esprit que tout le monde doit y trouver son intérêt.

Vous développez maintenant des normes pour les pierres précieuses. Certains affirment que ce secteur est un peu en retard à ce niveau et certains y sont même hostiles.

C’est un secteur très disparate. Il n’y a pas de De Beers. Il n’y a pas de structure qui le formalise. Il y a une grosse société, Gemfields. Et lorsque vous avez un tel morcellement au sein d’une industrie, il est difficile de rassembler ses acteurs derrière des principes, derrière une solution. Au cours de l’année que j’ai passée à ce poste, je n’ai jamais vraiment rencontré d’oppositions à l’intégration des pierres précieuses. Je pense que les gens vont bien les accueillir. On trouve des avis divergents sur la façon de procéder. Et la difficulté pour le RJC sera de savoir comment intégrer ces différentes opinions. Je pense que c’est possible, que nous devons le faire et que cela va stimuler la confiance dans ce secteur.

La plupart des pierres précieuses sont extraites de façon artisanale. Cela va-t-il vous compliquer la tâche ?

Ça rend les choses très difficiles, mais pas impossibles. Mais nous ferons venir des compétences de tous les horizons afin d’aboutir à quelque chose qui soit fonctionnel.

Ce que les gens regrettent à propos du RJC, c’est que les audits ne couvrent parfois qu’une partie d’une société. Pensez-vous que cela sera précisé ?

C’est assez simple. Vous ne recevez pas la certification intégrale. La certification n’est valable que pour la partie qui a été certifiée.

Mais lorsqu’une société affirme qu’elle est certifiée par le RJC, on suppose que cela concerne toute sa structure.

Ça peut être trompeur et si c’est l’idée que l’on s’en fait, alors nous devrons aborder le problème, et nous le ferons.

Comment vendez-vous votre projet aux petits détaillants qui voudraient peut-être rejoindre le RJC mais sont inquiets de la charge que pourrait représenter la certification ?

Je peux le comprendre, ils sont occupés. [Nous devons] faire passer le message, les faire participer plus efficacement et leur montrer vraiment en quoi ils font partie intégrante d’une industrie plus grande et plus vaste…

Je dis [souvent] que nous travaillons sur le marché de l’assurance, plutôt que d’être une organisation normative qui s’intéresse à la santé et à la sécurité, ainsi qu’aux droits de l’homme. Ce que nous faisons aussi, mais pourquoi le faisons-nous ? Nous assurons l’intégrité du produit que nous négocions.

Il y a aussi toute la question de l’autoévaluation. Nous venons de revoir nos formulaires d’autoévaluation. Nous sommes en train de les tester sur le terrain en ce moment. Ils sont bien plus précis et bien plus faciles à utiliser. Ils n’ont jamais été pesants, mais ils sont plus simples maintenant.

L’une des principales caractéristiques du RJC et d’autres organisations de l’industrie, c’est d’atténuer le risque de la législation obligatoire. Si vous pensez que l’adhésion et l’audit risquent d’être coûteux – ce que je ne pense pas, je pense que le rapport qualité-prix est très avantageux –, attendez que la législation vous y oblige. Cela vous coûtera beaucoup d’argent, vous n’aurez pas votre mot à dire et ce sera irrévocable.

Qu’avez-vous d’autre dans vos tiroirs ?

Nous dépendons fortement des adhésions. C’est la base de notre organisation. Mon travail est de créer des liens avec les adhérents, de communiquer avec eux, pour m’assurer que leurs besoins soient bien pris en compte dans ce que nous faisons. Nous n’aurons pas tous les bijoux sous notre contrôle dans les trois prochaines années. Cela ne signifie pas que nous ne devons pas continuer de parler des prochaines étapes.

On constate une forte volonté d’intégrer l’argent. Cela ne devrait pas être trop difficile sur le plan logistique. Lorsque vous regardez la vitrine d’une boutique, elle peut accueillir de nombreuses matières différentes. Même de l’acrylique. L’acrylique devrait-elle, du coup, faire l’objet de l’étude ? C’est une chose qui évolue.

Nous venons de terminer notre première décennie et nous avons vécu une histoire remarquable. Nous abordons maintenant notre deuxième décennie. Voyons comment elle se déroulera.

Source JCK Online