De Beers Botswana se prépare à un nouvel accord commercial

Avi Krawitz

Le Botswana se retrouve une fois de plus à un tournant. Ce pays enclavé et peu peuplé est en lutte constante pour assurer la pérennité de son industrie diamantaire.[:]

Sachant pertinemment que l’extraction de diamants ne durera pas éternellement, le gouvernement a cherché, avec son programme de valorisation, à installer des services de taille, de commercialisation et des services auxiliaires pour tenter de diversifier son industrie – et son économie – et d’être moins dépendant du secteur minier.

Au-delà de l’extraction minière

De Beers, qui réalise près de 59 % de la valeur de sa production au Botswana, a joué un rôle majeur dans cet effort. Pour commencer, elle a réservé une partie de son offre de brut pour qu’elle soit transformée au Botswana. Aujourd’hui, on compte 18 sightholders disposant d’usines dans le pays. En 2013, De Beers a déménagé son siège commercial à Gaborone, emmenant avec elle ses 10 sights annuels, précédemment organisés à Londres. Elle a ainsi détourné le trafic et l’activité diamantaire vers cette ville d’Afrique.

En outre, avec la création la même année d’Okavango Diamond Company, une société parapublique, le gouvernement a eu accès à 15 % de la production de Debswana, sa coentreprise minière avec De Beers. C’était la première fois que d’importantes ventes de brut de Debswana étaient organisées en dehors du système De Beers.

L’accord de 2011 qui régissait ces opérations sera sujet à renouvellement en 2020. Les négociations devraient débuter l’année prochaine. Pour sa part, le gouvernement cherche à accroître l’offre aux sightholders locaux, une façon de créer davantage d’emplois, a indiqué Mokgweetsi Masisi, le président nouvellement élu, à Bloomberg en mai.

Certains se demandent si le Botswana est en mesure de gérer davantage de fabrication, étant donné que quelques usines ont fermé ces dernières années. Si la rentabilité demeure la plus grosse difficulté des fabricants, Gaborone doit encore prouver qu’elle peut être un centre viable pour de la taille en gros volumes. Peut-être De Beers a-t-elle un rôle à jouer là aussi.

Le gouvernement voudra aussi probablement accroître le pourcentage d’approvisionnement qu’Okavango reçoit de Debswana. Il pourrait également vouloir négocier un accès élargi aux gros diamants et aux diamants de grande valeur extraits par Debswana.

Creuser en profondeur

Le Botswana a un certain avantage au sein de sa relation avec De Beers. Le pays détient une part de 15 % dans le groupe, Anglo American détenant les 85 % restants. Les deux sont aussi des partenaires à parts égales dans Debswana et dans DTC Botswana, une société qui trie et réalise les assortiments sur la production de De Beers et d’Okavango.

De Beers, en revanche, apporte avec elle ses compétences dans l’extraction minière et son budget. En 2010, elle s’est engagée à investir 3 milliards de dollars sur 15 ans dans l’expansion Cut-8 de la mine Jwaneng, considérée comme l’actif diamantifère le plus précieux au monde.

Ce projet est déjà la principale source de minerai de Jwaneng et devrait prolonger la durée de vie de la mine jusqu’en 2030, avec quelque 93 millions de carats. Les études de viabilité de Cut-9 sont en cours, ce qui prolongerait encore la durée de vie de Jwaneng. La décision finale en matière d’investissement dans le projet devrait intervenir plus tard cette année, a indiqué un porte-parole de De Beers.

De Beers pourrait utiliser le possible investissement dans Cut-9, ainsi que les extensions de financement des mines Orapa et Letlhakane, comme des instruments de négociation avec le gouvernement.

Investissements africains

De Beers dépend d’un équilibre aussi fragile dans d’autres pays africains où elle est présente.

En Afrique du Sud, il est possible qu’elle soit contrainte de réduire sa participation dans les entreprises locales, de 74 % à 70 % en raison de la nouvelle charte minière, puisque le gouvernement souhaite davantage d’implication dans l’émancipation économique des populations noires locales (BEE). Ceci dit, De Beers est engagée dans un projet de 2 milliards de dollars afin de développer l’extraction souterraine dans l’actif Venetia. À partir de l’année prochaine, Venetia sera sa seule mine en Afrique du Sud, puisqu’elle prévoit de fermer celle de Voorspoed. Elle a déjà vendu les opérations de Finsch, Cullinan et Kimberley ces dix dernières années.

Entre-temps, en mai 2016, De Beers a signé un contrat commercial de 10 ans avec la Namibie au titre duquel elle a cédé 15 % de l’offre locale au gouvernement et promis davantage de diamants aux tailleurs locaux. La société a ensuite annoncé des investissements majeurs dans ses opérations minières marines au large des côtes namibiennes.

C’est ce type de compromis que Mokgweetsi Masisi espère voir aboutir à une situation « gagnant-gagnant » pour les deux parties lorsqu’elles négocieront leur prochain accord de long terme – surtout lorsqu’on considère qu’une si grande part de la future production diamantaire du Botswana dépend de l’expansion de Jwaneng.

« Nous entretenons une très belle relation avec De Beers et nous pensons que cette relation deviendra encore plus solide, a indiqué le président à Bloomberg en mai. Les rendements [issus du développement de Jwaneng] vont se concrétiser au cours du prochain accord. C’est un mariage que nous appelons de nos vœux. »

Source Rapaport