C’est parti… pour un regain de mariages

Michelle Graff

Le nombre de mariages devrait approcher les 2,5 millions aux États-Unis cette année, du jamais vu depuis 1984.

Organiser des événements à grande échelle, c’était un peu, ces dernières années, comme apprendre à conduire avec une boîte manuelle : c’est difficile au début, on réalise de nombreux démarrages et arrêts saccadés et on cale de façon inattendue.

Les membres de l’industrie des bijoux connaissent bien cette situation. La liste annuelle des événements du secteur, autrefois stable, est chamboulée depuis trois ans maintenant.

De nombreux couples qui envisageaient de se marier ont aussi vécu cette expérience. La Covid-19 a perturbé leurs projets de célébrations en 2020 et 2021, ce qui explique les prévisions d’un grand nombre de mariages aux États-Unis cette année.

Shane McMurray, fondateur et PDG de la société d’études de marché The Wedding Report Inc., prévoit qu’environ 2,5 millions de couples se passeront la bague au doigt en 2022 et dépenseront en moyenne 24 300 dollars pour l’occasion. The Knot a publié des prévisions aussi optimistes, avec 2,6 millions de mariages.

Si ces chiffres étaient avérés, il s’agirait du plus grand nombre de mariages aux États-Unis depuis 1984, année où les baby-boomers, alors âgés de 20 à 38 ans, entraient dans la tranche d’âge propice aux unions (chiffres compilés par Shane McMurray et provenant du bureau du recensement américain).

Ce boom présente une opportunité pour les bijoutiers, qu’il s’agisse des bijoux du jeune couple pour le jour J, de cadeaux échangés entre les époux ou de cadeaux pour les invités à la fête.

Tendances des mariages

Les tendances globales de l’industrie des mariages reflètent l’orientation certainement la plus importante des bagues de fiançailles à l’heure actuelle : les couples veulent des bijoux personnalisés qui représentent leur personnalité respective et leur relation.

Sheavonne Harris, organisatrice de mariages et propriétaire de Events by Sheavonne, a affirmé que ses clients raccourcissaient leur liste d’invités afin de n’y inclure que la famille proche et les amis. Ils investissent plutôt dans la fête, délaissent le gâteau de mariage en faveur d’autres desserts – un couple avec lequel elle a travaillé avait choisi un camion de glace – et/ou abandonnent la traditionnelle fête de fiançailles.

Et tout comme certaines futures mariées optent pour une bague de fiançailles avec une pierre de couleur, d’autres choisissent de porter des robes qui ne sont pas exclusivement blanches, avec par exemple une touche de couleur sur une ceinture ou un volant, une teinte subtile sur l’ensemble de la robe ou encore une couleur vive.

Sheavonne Harris a affirmé que l’une des récentes fiancées avec qui elle a travaillé portait du rose, tandis qu’une autre a choisi du vert, une tendance qui devrait selon elle s’installer.

Les couples veulent se souvenir de la journée de leur mariage et se dire : « C’est exactement ce que nous voulions », et non « Nous l’avons fait parce que nous y étions obligés. »

« Nous nous recentrons sur ce qu’ils veulent vraiment, et non sur ce qu’ils sont censés avoir, a affirmé Sheavonne Harris. Ce sont vraiment eux qui se posent les questions du style : « Je ne veux pas le faire, pourquoi devrais-je m’y résoudre ? » »

Shane McMurray a déclaré dans son étude qu’il rencontre également des couples qui rompent avec la tradition pour diverses raisons.

Tout d’abord, rompre avec certaines traditions – comme le gâteau ou les fleurs – leur permet de s’offrir exactement ce qu’ils veulent dans d’autres domaines, comme le traiteur, le lieu ou le photographe.

Cette situation est particulièrement vraie en 2022 où les couples sont aux prises avec l’inflation, les problèmes de la chaîne d’approvisionnement et les pénuries de main-d’œuvre. (Obtenir du personnel pour des événements est « vraiment difficile à l’heure actuelle », a fait remarquer Shane McMurray.)

Ensuite, de nombreux couples règlent la note globale de leur mariage, ou au moins une partie, ils se sentent donc libres d’imaginer la cérémonie et la célébration qu’ils veulent.

The Wedding Report a établi une rétrospective depuis 2017 en détaillant la fréquence à laquelle les couples règlent 100 % du prix de divers aspects de leur mariage, de la bague de fiançailles (85 % du temps) aux musiciens pour le grand jour (62 %).

En moyenne, d’après The Wedding Report, les couples règlent actuellement 100 % du prix de divers aspects de la cérémonie et de la célébration 72 % du temps.

Enfin, Shane McMurray considère que la tendance consistant à rompre avec des pratiques établies de longue date dans les mariages et les cérémonies est le reflet d’une société qui se détache de la tradition.

Quant au calendrier des 2,5 millions de mariages, selon Shane McMurray, les mois préférés varient en fonction des régions mais, généralement, la plupart se produisent en mai ou en juin, puis en septembre ou octobre.

Or, si les salles sont déjà réservées en 2022, cela pourrait obliger des couples à choisir des mois moins populaires, comme juillet et août.

Jusqu’à ce que la demande s’épuise

Même si le rebond attendu du nombre de mariages représente une opportunité cette année, Shane McMurray a fait remarquer qu’il s’agit davantage d’un pic induit par la pandémie qu’une tendance à long terme.

Les données issues des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) montrent que le rythme des mariages américains – autrement dit le rapport entre le nombre de mariages et la population totale – est stable ou diminue depuis le milieu des années 80. Shane McMurray insiste sur cet aspect auprès de ses clients, fournisseurs du secteur du mariage.

(Les CDC établissent des statistiques sur les naissances, les mariages, les divorces et les décès, des données considérées comme des « statistiques d’état civil ».)

Il a affirmé qu’un grand nombre d’acteurs des industries du mariage et autres secteurs associés s’attendaient à un grand boom des noces aux États-Unis lorsque la génération Y, celle venant à la suite des 70 millions au moins de baby-boomers, aura atteint l’âge du mariage.

National Jeweler partageait cette croyance. En août 2010, nous avions publié un article dans l’édition papier, intitulé « Here Comes the Millennial Bride », qui montrait comment « les enfants des baby-boomers devraient fortement influer sur le marché du bridal. »

Mais ce boom n’a pas eu lieu, du moins pas encore.

Au cours de la décennie qui a suivi la publication de cet article, le nombre de mariages aux États-Unis est resté sable, entre 2,1 millions et 2,2 millions chaque année, d’après des données du recensement américain.

Entre-temps, des données des CDC montrent qu’entre 2010 et 2013, le taux des mariages était stable, avec 6,8 unions pour 1 000 habitants.

Ce taux est monté à 7 en 2016 mais est depuis redescendu, chutant à 6,1 mariages pour 1 000 habitants en 2019.

D’après les données, ce chiffre est inférieur au plus bas taux de mariages enregistré lors de la Grande dépression (7,9 en 1932) et bien en dessous de celui des lendemains de la seconde guerre mondiale, en 1946, où l’on comptait 16,4 mariages pour 1 000 habitants.

Pour Shane McMurray, après 2022, le nombre de mariages devrait retrouver les niveaux d’avant la pandémie. Il estime que 2,2 millions de mariages seront célébrés en 2023, puis en 2024, et qu’il y en aura 2,1 millions en 2025.

« Le nombre de mariages est important cette année uniquement à cause de la Covid-19 et c’est là le vrai problème, a-t-il déclaré. Il ne s’agit pas de croissance. Il s’agit d’une demande latente. »

Source National Jeweler


Photo © Nathan Dumlao on Unsplash_